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tion est le plus active, étaient en orme, et lors de la construction du pont actuel au commencement de ce siècle elles se trouvaient encore, après huit cents ans de séjour dans l’eau, aussi saines que le premier jour.

Comme le hêtre, le charme est excellent pour le chauffage, mais il a un grain serré, coriace, qui le fait rechercher surtout pour la fabrication des écrous, roues dentées et autres objets soumis à une très forte pression. Le bouleau sert à faire des sabots ; l’érable est très employé dans l’ébénisterie et la menuiserie ; il en est de même du merisier, du tilleul, du peuplier et de quelques autres essences moins importantes. Les arbres résineux, pins, sapins, épicéas, mélèzes, sont plus particulièrement réservés à la fabrication des planches et des charpentes ; mais, eux aussi, ils varient beaucoup suivant les contrées d’où ils viennent, suivant qu’ils ont végété au nord ou au midi, dans les plaines ou sur les hauteurs. Les cèdres et les mélèzes, qui donnent des bois très durs et très denses dans les régions élevées, croissent beaucoup plus vite dans les lieux bas, mais ils y deviennent moins durables et moins vigoureux. Le pin Weymouth, un des arbres les plus précieux de l’Amérique, a dans nos climats un tissu lâche et mou comparable à celui du saule. La supériorité des sapins du Nord sur ceux de notre pays est connue depuis longtemps, et cependant on constate, même entre les premiers, des différences sensibles. Ainsi les charpentes de Memel valent mieux que celles de la Suède, et les madriers de Riga ou de la côte norvégienne, tempérée par le gulf-stream, sont plus recherchés que ceux d’Arkhangel. Dans les contrées où la température présente des écarts peu sensibles, les arbres ont en général une structure régulière qui leur donne une grande élasticité, et les rend très précieux pour la mâture.

Cette rapide énumération des principales essences forestières de l’Europe et des qualités de chacune d’elles suffit à montrer combien il eût été désirable non-seulement que chaque pays eût pris part à l’exposition, mais qu’à la collection complète des bois qu’il produit il eût joint l’indication des usages auxquels ils peuvent être employés, et du prix auquel on peut les obtenir sur ses marchés. S’il y eût ajouté un herbier contenant les feuilles, fleurs et fruits de chaque arbre avec des détails spéciaux sur le lieu d’habitation et l’importance des massifs qu’il forme, on aurait eu sous les yeux le tableau complet des richesses forestières de l’Europe, ce qui, au point de vue scientifique comme au point de vue industriel, eût été une bonne fortune. Malheureusement la botanique pas plus que l’industrie n’ont rien à attendre de l’étude, si minutieuse qu’on la suppose, des collections européennes réunies au palais de Kensington.