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V.

Grâce à l’Angleterre, dont les colonies sont disséminées sur tous les points du globe, nous avons pu voir en quelque sorte réunis les échantillons de tous les produits ligneux du monde entier, et nous faire une idée des services qu’ils sont appelés à nous rendre. Quoique bien confuse encore, cette idée suffit pour nous faire apprécier l’importance de ces produits, pour nous montrer qu’ils alimentent, soit comme combustibles, soit comme matières premières, la plupart de nos industries, et pour nous faire considérer enfin l’arbre comme le plus précieux de tous les végétaux que la nature ait mis à notre disposition ; mais combien sur ce point ce que nous connaissons est peu de chose à côté de ce que nous ignorons ! Qui sait ce que nous pourrions retirer des 1,200 ou 1,500 espèces qui vivent sur la terre, et dont beaucoup n’ont pas encore d’existence botanique bien constatée ? Il n’en est pas une qui, à côté de son bois, ne puisse nous fournir quelque autre produit non moins précieux : des fruits, des écorces, des fibres textiles, des substances tinctoriales ou pharmaceutiques, des huiles, des gommes, des résines, et une foule d’autres matières que nous ne soupçonnons pas. L’ailanthe et le mûrier servent à nourrir l’insecte qui nous donne la soie, source d’une industrie immense qui fait vivre des millions d’hommes ; mais combien d’autres espèces pourraient nous rendre des services analogues ! Le quinquina, le quassia, sont employés par nous comme fébrifuges ; mais connaissons-nous seulement la dixième partie des remèdes que les Indiens tirent de leurs arbres, et avec lesquels ils guérissent des maladies où toute notre science reste impuissante ? Il y a donc dans cette voie d’immenses progrès à faire, et l’exposition aurait pu y contribuer puissamment, si, comme je l’ai dit au début de cette étude, les collections avaient été rangées avec plus de méthode, si, réunies dans une même salle, elles avaient permis à l’industriel comme au savant d’en faire l’examen détaillé.

À défaut de ce résultat positif, l’exposition en a du moins eu un négatif, celui de nous montrer combien nos connaissances sur ce point sont encore peu étendues. Ce ne sont pas seulement les qualités des différens bois et les produits variés qu’on pourrait tirer des arbres qui nous sont inconnus ; ce sont parfois les caractères botaniques des espèces, et même de celles qui depuis longtemps déjà sont entrées dans la consommation. Le plus souvent, dans le commerce, les bois exotiques sont désignés par des noms usuels qui n’ont rien de scientifique. C’est sous ces noms divers que les