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Il fut alors décidé qu’il serait utilisé pour rattacher Malte à Alexandrie. Malte étant déjà relié par l’intermédiaire de la Sicile, on aurait par cette voie la communication avec la route des Indes jusqu’à Suez inclusivement. Le tracé le plus prudent, sinon le plus court, parut être, en partant de Malte, de marcher vers le sud et d’atterrir sur la côte d’Afrique à Tripoli, puis de suivre la côte libyenne de Tripoli à Alexandrie avec un point d’arrêt intermédiaire à Benghazy. La distance totale, qui est de 2,500 kilomètres environ, se trouvait ainsi divisée en trois sections de longueur presque équivalente. Entre Malte et Tripoli, la profondeur est de 800 mètres au plus; sur le reste du parcours, où la ligne suit la côte, la profondeur varie entre 100 et 400 mètres à une distance d’au moins 7 kilomètres du rivage; le fond, très irrégulier, est souvent garni de rochers aigus qui peuvent inspirer quelques inquiétudes. Les renseignemens nous manquent sur l’état électrique de ces câbles; nous savons seulement que la ligne est en pleine exploitation et n’a cessé de fonctionner depuis le 1er septembre 1861. Ce succès a déterminé l’ancienne compagnie de la Mer-Rouge à réparer les conducteurs abandonnés depuis plus d’un an. Une coupure a été faite sur le premier câble de Suez à Cossëir, et un bureau télégraphique a été établi dans l’île Jubal, sur le trajet du courrier de l’Inde. Les communications s’arrêtent là pour le moment, à peu près à moitié chemin entre Marseille et Bombay; il y a lieu de croire que la compagnie ne s’arrêtera pas à cette première étape.

L’année 1861 a été féconde en succès pour la télégraphie océanique. Au mois de juin, l’immersion d’un câble entre Toulon et Ajaccio, favorisée par un temps magnifique, réussit à souhait. La distance est de 280 kilomètres, et la longueur de câble de 326 kilomètres; la profondeur atteint quelquefois de 7 à 800 mètres. A voir avec quelle facilité et nous pouvons ajouter avec quelle sécurité cette dernière entreprise a été conduite, le lecteur pourra apprécier les progrès réalisés depuis dix ans et se former une idée nette de la situation de l’industrie télégraphique. Lorsqu’elle se borne aux fleuves et aux bras de mer de peu d’étendue, surtout de peu de profondeur, la télégraphie sous-marine est un problème résolu depuis longtemps; ses opérations n’ont plus rien d’aléatoire. Quant aux câbles véritablement océaniques, les succès obtenus pendant ces dernières années nous autorisent à croire que, jusqu’à 1,000 kilomètres de longueur et 3,000 mètres de profondeur, les entreprises sagement conçues et prudemment conduites réussiront, pourvu que l’on ne se laisse pas décourager par des accidens imprévus. C’est donc dans ces limites que, pour le moment, les ingénieurs paraissent devoir se renfermer; mais il semble hors de doute que les essais