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majesté reconnaîtra qu’il est de sa justice, et la reine qu’il est de la protection héréditaire que réclame la Franche-Comté, de lui conserver une représentation des trois ordres qui la composent, et de ne pas y substituer une assemblée inconstitutionnelle qui ne représente rien, soumise à une autorité plus inconstitutionnelle encore. »

Cette allusion au mariage de Louis XVI avec une princesse de la maison d’Autriche servait assez habilement de voile à la comparaison des deux dominations, mais n’en déguisait qu’à demi la gravité. Le parlement réclamait donc comme un droit le rétablissement des états de la province tels qu’ils étaient avant la réunion, c’est-à-dire en trois ordres séparés ; il admettait seulement que la chambre du tiers-état devînt plus nombreuse. « Si la sollicitude paternelle que votre majesté doit principalement aux pauvres n’est pas suffisamment apaisée par la représentation dont jouissait le tiers-état dans les assemblées de nos états, elle peut y suppléer en ordonnant que le tiers-état sera représenté par des députés de chaque district, et même, si elle le juge à propos, de chaque communauté (commune). Plus la représentation du tiers-état sera nombreuse, plus votre parlement applaudira, et nous pouvons vous assurer, sire, que les deux premiers ordres, loin d’envier au peuple tout ce qui peut soulager sa misère ou l’en consoler, seront flattés, honorés d’avoir pour coopérateurs les citoyens vertueux que cet ordre estimable choisira dans son sein. »

Le gouvernement maintint d’abord sa volonté ; cependant il ne paraît pas que l’assemblée provinciale se soit réunie, car on n’en a trouvé aucune trace. Quand survinrent les malheureux édits de mai 1788, le parlement de Besançon refusa de les enregistrer comme tous les parlemens de France, et y fut, comme les autres, contraint par la force. Exilés et dispersés, ses membres se répandirent sur tous les points de la province et y portèrent l’agitation. Le corps de la noblesse n’avait pris jusque-là aucune part à la querelle ; mais après l’exil du parlement cent gentilshommes se réunirent et signèrent le 4 juin une lettre au roi pour réclamer à leur tour le rétablissement des anciens états. M. de Brienne, premier ministre, leur répondit que, la noblesse ne pouvant s’assembler sans la permission du roi, tout acte non précédé de cette formalité était nul de soi, que le roi pèserait cependant le vœu qu’on venait de lui exprimer, et qu’après tout une assemblée d’états ne différait guère d’une assemblée provinciale. La, noblesse voulut se réunir de nouveau ; mais sur l’ordre du marquis de Saint-Simon, commandant de la province, qui menaçait d’employer la force, elle se sépara par deux fois, et finit par s’assembler au prieuré de Saint-Renobert le 10 septembre 1788. Là elle vota une seconde lettre au roi, en y joignant une pièce historique