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décuple, il est fort difficile de fixer la moyenne du rendement des exploitations actuelles. Je ne crois pas être bien loin de la vérité en l’évaluant à 16 ou 18 dollars, environ 85 francs par tonne. Il y a donc dans une tonne de ces minerais près de cent vingt fois plus d’or que dans les graviers de San-Juan ; mais quelle différence dans la quantité de travail nécessaire pour obtenir le métal !

Il faut ici arracher la roche à la poudre dans le fond de mines le plus souvent envahies par les eaux. Il faut des machines à vapeur pour épuiser ces eaux et retirer les minerais, et une fois emmené au jour, il faut séparer le minerai utile de la roche stérile, toutes dépenses qui, dans le cas le plus ordinaire, s’élèvent en Californie, pour chaque tonne de minerai trié, à 33 fr. 70 cent. Ces minerais doivent être transportés des mines à l’usine, ce qui, pour une distance moyenne, entraîne une dépense d’environ 5 fr. 40 c. Arrivée à l’usine, la roche aurifère doit être concassée, puis bocardée, c’est-à-dire réduite en sable fin, sous de lourds pilons en fonte que manœuvre une machine à vapeur ou une roue hydraulique. Ces sables doivent être enfin soumis au lavage et à l’amalgamation qui retire l’or, toutes opérations qui, par tonne de minerai traité, coûtent ensemble environ 17 fr. 80 c. À ces dépenses spéciales il faut joindre une somme de 3 fr. par tonne pour tenir compte des frais généraux dans les exploitations d’importance ordinaire. On arrivé ainsi à une dépense de 60 fr. pour le traitement d’une tonne de quartz. Si on admet maintenant le chiffre de 85 fr. que j’ai indiqué plus haut pour rendement ordinaire, on voit que le bénéfice ressort à 25 fr. par tonne, chiffre certainement fort médiocre pour des entreprises de cette nature.

L’exploitation des mines de quartz en Californie n’a donc rien en général de bien séduisant, et cependant quelles magnifiques espérances n’avait-on pas conçues à l’origine ! C’était en 1853 : les placers de rivières étaient déjà bien épuisés ; quelques crêtes de filons à Grass Valley, à Nevada, à Mariposa, avaient fourni des minerais très riches, et avaient aussitôt attiré l’attention des mineurs. Ce n’était pas au dehors, disait-on, qu’il fallait chercher l’or, mais bien dans les profondeurs : dans les entrailles mêmes de la montagne devait se trouver le véritable trésor, source de tous les autres, et de tous côtés on se mit à attaquer la roche. Ce fut bientôt une véritable fureur. Ainsi moins de trois ans après, en 1856, plus de 1,500 chevaux-vapeur, tirés de New-York ou de Londres, pilaient les quartz de la Nevada ; mais les produits attendus ne vinrent pas, et le plus grand nombre de ces entrepreneurs succombèrent sous le poids écrasant des dépenses de premier établissement. Il fallut liquider. Tout ce puissant outillage des usines ruinées fut alors acheté à prix réduit par de nouveaux entrepreneurs, qui purent ainsi reprendre le