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naître et survivront aux souffrances qu’elles sont venues soulager. Il y a des écoles pour les hommes, les femmes et les enfans. Ces dernières ne sont en réalité que des salles d’asile. Les écoles des femmes sont de beaucoup les plus nombreuses. La fondation en est presque toujours due à la charité de quelque particulier, souvent d’un ministre d’un culte quelconque, qui l’établit dans le local destiné d’ordinaire à l’instruction de ses ouailles; mais la plupart de ces écoles joignent maintenant aux contributions qu’elles recueillent directement une forte subvention du comité du district où elles se trouvent. Je ne puis m’empêcher de dire en passant qu’une somme d’environ 16,000 liv. sterl. (400,000 fr.) a été envoyée par la colonie de la Nouvelle-Galles du sud, spécialement destinée à soutenir ces écoles. Le régime est à peu près le même dans toutes celles que j’ai visitées soit à Manchester, soit dans d’autres villes du Lancashire. On y enseigne à lire, à écrire, à compter et surtout à coudre; de là le nom de sewing schools qui leur est ordinairement appliqué. Le salaire y est généralement de 2 shill. 4 den. à 3 shill. 6 den. par semaine, un peu moins lorsque plusieurs membres d’une même famille s’y trouvent réunis. Les ouvrières qui servent de maîtresses reçoivent jusqu’à 4 shill. Dans la plupart des écoles se trouve une cuisine où l’on fournit aux ouvrières un repas en déduisant de leur salaire 1 den. l/4. Pour cette somme modique, elles ont un plat suffisant et nourrissant, grâce au zèle des dames qui en général dirigent cette cuisine et y contribuent par leur souscription. Beaucoup de dames aussi se consacrent à la direction même de l’école et à l’instruction des ouvrières, passant leur journée au milieu d’elles : elles se louent fort de leur intelligence, de leur zèle à l’étude et de leur reconnaissance pour l’instruction qu’on leur donne. Il paraît que le travail de la filature, en leur déliant les doigts, les prépare à apprendre l’écriture avec une rapidité surprenante[1].

Bien des gens blâment ces soins et craignent pour les ouvrières le retour à la manufacture; pour moi, j’avoue que je ne vois qu’un grand avantage à tout ce qui peut les mettre en contact avec les autres classes de la société; elles gagneront elles-mêmes à ce rapprochement un sentiment plus vif de leur dignité, et les liens ainsi formés ne s’effaceront jamais entièrement.

Je ne puis donner ici une statistique de toutes ces écoles; mais,

  1. Le comité central s’efforce de faire adopter un règlement uniforme du temps de travail, qu’il voudrait voir s’élever jusqu’à vingt-cinq heures par semaine, ou cinq heures par jour pendant cinq jours, le samedi étant libre. Le comité central a d’autant plus à cœur l’application de ce règlement, que, d’après la volonté des donateurs, le fonds spécial de la Nouvelle-Galles du sud ne doit être affecté qu’aux écoles qui ont ainsi fixé les heures de travail.