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dage à 4,000 mètres peut se faire par ce procédé en moins de quarante-cinq minutes.

Il y a peu d’années que nous avons des moyens précis pour mesurer les grandes profondeurs de la mer, et les marines française, anglaise et américaine ont déjà relevé un grand nombre de cotes de sondage; mais ces opérations, faites pour la plupart en vue de l’étude des projets télégraphiques, ne sont pas reliées entre elles. Nul ne s’est proposé de lever le plan d’un océan comme on dresse la carte d’une contrée que les voyageurs traversent incessamment. Notre mer intérieure, la Méditerranée, est assez bien connue; il est à peu près certain qu’il n’y a nulle part plus de 3,500 mètres d’eau. Dans l’Atlantique, on a trouvé des hauteurs très variables, rarement supérieures à 6,000 mètres et toujours plus grandes que 2,000, sauf une région très limitée autour des îles et le long des continens. On remarque en général que les eaux atteignent rapidement une énorme profondeur sur les côtes abruptes; par exemple les Açores, Madère, les Bermudes, îles volcaniques, surgissent subitement, et pour ainsi dire sans transition, d’une vallée très creuse. Au contraire, le sol de la mer, dans le voisinage des archipels, se prolonge très loin en bas-fonds. Ainsi, dans la mer de Java, entre Singapore et Batavia, on a pu immerger un câble de 900 kilomètres de long sans trouver 100 mètres d’eau. Il reste encore d’immenses étendues à explorer; jusqu’à ce jour, les sondages les plus profonds parmi ceux qui présentent suffisamment d’authenticité n’ont pas dépassé 8,000 mètres. Quelques sommets des Cordillères ont près de 7,700 mètres au-dessus du niveau de la mer; le pic dominant de l’Himalaya s’élève à 7,821 mètres. Les prévisions de Laplace sont donc bien exactement confirmées.

Il semble que les corps organisés qui pénètrent dans ces abîmes vertigineux doivent être notablement modifiés dans leur forme et leur texture. En effet, la pression s’augmente d’un peu plus d’une atmosphère à mesure que l’on descend de 10 mètres sous l’eau; à 4,000 mètres, les corps sont comprimés par une force de 400 atmosphères. Au-dessous de 10,000 mètres, une bulle d’air serait réduite à un volume si petit qu’elle serait plus lourde que l’eau, et, si telle chose peut se concevoir, coulerait au fond comme une balle de plomb. Cependant il ne faut pas s’exagérer l’effet de ces pressions, et pour les apprécier à leur juste valeur on doit prendre d’autres termes de comparaison. Habitués que nous sommes à considérer comme excessive une pression de 15 à 20 atmosphères exercée sur un corps susceptible de déformation, une chaudière par exemple, nous avons peu d’idée des efforts que les corps compactes peuvent subir sans être écrasés. Une pression d’une atmosphère correspond