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ancres des navires, s’éloigner des régions volcaniques où l’on se trouverait exposé aux commotions du sol, telles sont les principales précautions à prendre. Les périls qui menacent un câble sur le rivage sont si variés que l’expérience seule peut apprendre à l’ingénieur quelles plages il doit redouter et quels remèdes il peut employer. Enfin il faut songer, dans le choix du tracé, aux incidens de la pose. En certaines régions de la mer règnent des courans ou des vents continus; ici les brouillards sont fréquens, là passent les glaces flottantes, telle mer n’est accessible que pendant la belle saison.

Le navire sur lequel le câble est chargé doit être d’un fort tonnage relativement au poids qu’il reçoit, car le chargement tient une place considérable. Pour un millier de kilomètres de long, un vaisseau à vapeur désarmé paraît très convenable, parce qu’il présente une grande stabilité sur l’eau, avantage inappréciable eu égard au poids insolite qu’il porte à l’arrière. La machine doit être en parfait état et posséder un excès notable de force, afin qu’une avarie accidentelle ne suffise pas pour entraver l’opération. L’engorgement d’une pompe, le dérangement d’une soupape, en un mot chacun de ces petits accidens, insignifians dans le service ordinaire d’un navire, serait pendant l’immersion une cause d’arrêt et peut-être une cause de perte. Le bâtiment doit être assez puissant pour marcher contre vents, courans et marée, assez stable pour ne pas fatiguer inutilement le câble qui pend à l’arrière et les hommes qui le manœuvrent. L’opération contribue sensiblement à augmenter le roulis des navires; or chacun sait que les bâtimens à hélice, plus convenables que les autres pour ce travail, roulent en tous temps d’une façon très incommode. Le câble est logé dans la cale, assez loin de la machine motrice, dont la chaleur le détériorerait. Il a été enroulé, au moment du chargement, en une immense bobine dont chaque spirale se soulève successivement pendant l’émission à la mer. De la cale, il est guidé sur le pont par des roues mobiles, il s’enroule plusieurs fois autour de grands treuils munis de freins qui modèrent sa vitesse, et enfin il plonge à l’arrière. Un homme veille sur le frein, le serre ou le desserre suivant les indications d’un dynamomètre qui indique la tension, et aussi suivant les mouvemens du navire. En effet, quand le tangage est très sensible, l’arrière du navire se soulève et s’abaisse alternativement, en entraînant le câble dans son mouvement. Lorsque la machine est bien construite et bien installée, que les freins sont assez puissans, que les ouvriers sont nombreux et exercés, toute cette manœuvre est fort simple tant qu’il fait beau temps et tant qu’il fait jour; mais si la mer est grosse, si la nuit est noire, si les hommes ont peine à se tenir debout sur le pont, peut-on éviter que le frein soit trop ou