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mais qu’on le trouve chez tous les quadrumanes supérieurs, que -chez ces animaux, comme dans notre espèce, le cerveau déborde le cervelet, qu’ils ont enfin une corne postérieure dans leurs ventricules latéraux, ainsi qu’un petit hippocampe. À la suite de cette discussion s’est engagée une polémique des plus vives qui est loin d’être encore épuisée. La, plupart des anatomistes anglais ont pris parti pour M. Huxley ; je citerai dans le nombre M. Rolleston, professeur d’anatomie à Oxford, qui a eu l’obligeance de me montrer, au musée de l’université, les cerveaux d’un grand nombre de singes ; M. Marshall, qui a publié une belle photographie d’un cerveau de chimpanzé ; M. Flower, le conservateur du musée du collège royal de chirurgie. Ces discussions, qui ont eu un très grand retentissement et où l’on a quelquefois apporté une ardeur regrettable, ont mis en relief les travaux d’un savant français trop modeste, M. Gratiolet, à qui l’on doit de bien remarquables études sur la structure du cerveau chez les mammifères. En comparant toutes les descriptions aujourd’hui connues, on peut s’assurer que la position relative du cerveau et du cervelet varie légèrement chez les quadrumanes : tantôt, le second est légèrement découvert, au moins sur une partie de son pourtour, tantôt il est à peine couvert, tantôt il l’est complètement, mais jamais la saillie n’est aussi proéminente que chez l’homme. Pour la corne postérieure, rudimentaire chez quelques singes, elle se développe davantage, chez les singes supérieurs, sans former cependant un enfoncement aussi marqué que chez l’homme ; enfin le petit hippocampe se montre aussi plus ou moins nettement chez la plupart des singes, sans être toutefois dessiné tout à fait comme dans le ventricule humain.

Il est permis de croire qu’on a peut-être attaché trop d’importance jà ces caractères, -d’autant plus qu’on ne sait absolument rien sur le rôle fonctionnel des hippocampes et des cornes. La science est sans doute obligée souvent de se borner à constater les faits sans prétendre les expliquer, mais, pour différencier les cerveaux humains et simiens, elle peut citer des caractères d’une interprétation moins obscure. M. Gratiolet a fait remarquer que le cerveau de l’homme a un poids exceptionnel, une hauteur verticale bien supérieure à celle qu’on mesure chez les singes, enfin que les lobes frontaux ont dans notre espèce une richesse de plis et une complication qui sont sans doute en rapport avec la supériorité de notre intelligence. On peut dire aussi, que le corps calleux[1] est bien plus étendu chez l’homme que chez les singes.

  1. Le corps calleux est une lame médullaire qui remplit la partie inférieure de la fissure profonde qui divise les deux hémisphères du cerveau.