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sans doute, de même que dans le second, il y a travail produit, par conséquent refroidissement ; mais immédiatement les parois résistantes du récipient d’arrivée arrêtent le mouvement, le gaz revient à l’état d’équilibre. Dans cette perte de mouvement, le travail disparu se retrouve sous forme d’une certaine quantité de chaleur qui est restituée au système, et cette quantité est précisément égale à celle qui avait été consommée dans le premier moment de l’expérience. De là vient qu’en définitive les thermomètres n’accusent aucun changement. Cette explication peut d’ailleurs être vérifiée et rendue sensible aux yeux : il suffit de plonger le premier récipient dans un vase d’eau, le second récipient dans un vase différent. On reconnaît alors le refroidissement qui correspond à la première phase de l’expérience, réchauffement qui suit ce premier phénomène, et on constate facilement l’équivalence des deux effets consécutifs.

Toutes ces expériences de M. Joule ont été répétées avec le soin le plus scrupuleux par M. Victor Regnault, le grand vérificateur des travaux modernes. Ainsi développées et étudiées sous toutes leurs faces, sanctionnées par ce contrôle éminent, elles démontrent clairement que la dilatation de l’air n’absorbe par elle-même aucune chaleur. Il n’y a de chaleur consommée que par le travail qui accompagne la dilatation. L’effet est ainsi restitué à sa véritable cause, et tout le monde comprendra la valeur de cette rectification apportée aux anciennes idées.

Une nouvelle pensée guide ainsi l’esprit quand il considère les rapports de la chaleur avec les changemens moléculaires des corps. On va voir la notion de capacité calorifique se transformer et s’éclairer. Commençons cependant par dire que les considérations qui vont suivre ne s’appliquent, du moins dans la forme simple où nous désirons les présenter, ni aux corps solides, ni aux corps liquides. Là en effet la cohésion des molécules, particularité mal connue et encore inabordable, masque les résultats. Nous n’aurons en vue que les gaz que l’on appelle gaz permanens, dont les molécules paraissent complètement libres les unes par rapport aux autres. Des recherches justement célèbres avaient été faites depuis longtemps sur la dilatation de ces gaz. On savait que lorsqu’on échauffe l’un d’eux, le nombre de calories qu’il absorbe sous l’unité de poids pour élever d’un degré sa température varie, suivant que pendant réchauffement on maintient son volume constant à l’aide d’une enveloppe inextensible, ou qu’on lui permet au contraire de se dilater en laissant seulement, constante la pression à laquelle il est soumis. À ces deux cas correspondaient pour un même gaz deux capacités calorifiques différentes : capacité calorifique à volume constant, capacité