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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




31 mai 1863.

La tyrannie d’une échéance périodique nous joue cette fois un mauvais tour : elle nous oblige à parler des élections générales au moment même où l’événement se consomme et dans l’ignorance du résultat qui va s’accomplir. Nous nous présentons devant le public en n’ayant à lui donner ni informations ni conseils. Les prophéties seraient de notre part une témérité ridicule, contredite et peut-être châtiée à l’instant même par les faits. Nos exhortations, arrivées après coup, ne seraient qu’une superfluité redondante. Nous avons à dire notre avis sur la pièce avant d’en connaître le dénoûment. À l’heure où tous descendent sur le champ émouvant de l’action, nous sommes contraints de remonter les degrés de notre observatoire solitaire. La tâche est assez ingrate, ce nous semble, pour nous donner des titres à l’indulgence de nos lecteurs de toute sorte.

Le mouvement électoral de 1863, on peut le dire avec assurance avant même de connaître le résultat des scrutins, marquera dans la politique intérieure de la France le commencement d’une phase nouvelle. Peu importe, à l’heure qu’il est, le nombre des candidats libéraux qui pourront être élus ; l’opposition libérale n’a jamais conçu à cet égard de présomptueuses espérances : elle connaissait trop les obstacles que devait lui susciter l’action administrative pour se bercer d’illusions ambitieuses. Mais une chose certaine, un résultat obtenu, un fait acquis, bien autrement intéressant que le succès électoral de telle ou telle candidature, c’est le réveil de l’esprit public. Il est impossible de donner un autre nom au mouvement auquel nous assistons depuis quinze jours. Ceux qui ont connu la France libérale dans un de ses rares beaux jours ont retrouvé la fibre de leur pays dans ce premier et généreux élan de vie politique. Pour nous, à qui les dures épreuves de la cause libérale ont depuis longtemps enseigné les désirs modérés et les espérances timides, nous avons rencontré là une de ces