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tinuer les recherches commencées, il y a déjà plusieurs mois[1], sur le littoral du sud-ouest de la France.


I.

Les landes ne comprennent pas seulement le département presque tout entier qui en tire son nom, elles embrassent aussi la moitié de la Gironde et l’angle extrême du Lot-et-Garonne. En outre on pourrait ajouter à cette région aux limites indécises quelques lambeaux de terrains analogues épars dans les départemens sous-pyrénéens et même dans la Saintonge, au nord de l’estuaire de Gironde. En ne tenant point compte de ces îlots sporadiques de bruyères et d’ajoncs, et en défalquant la partie du territoire landais déjà boisée ou mise en culture, on évaluait en 1860 la superficie des landes proprement dites à près de 650,000 hectares. Sur cet espace considérable, les landes du Médoc, comprises dans la sous-région parfaitement déterminée que limitent l’Océan, le bassin d’Arcachon, le chemin de fer de Bordeaux à La Teste, et le cours de la Gironde, occupent environ 80,000 hectares. Ancien lit de la mer à une époque géologique antérieure, les landes du Médoc constituent une espèce de plateau de forme triangulaire, bombé au centre « comme la carapace d’une tortue, » et s’abaissant en pente douce d’un côté vers la Gironde, de l’autre vers les étangs du littoral. L’élévation moyenne de ces plaines au-dessus du niveau de la mer est de 40 mètres.

Depuis quelques années, le travail de l’homme a beaucoup fait pour reconquérir ce vaste domaine, autrefois si négligé; mais encore en bien des endroits la lande rase se montre dans son auguste et triste majesté aux rares piétons qui la parcourent à l’aventure, soit pour abattre quelque gibier, soit uniquement pour s’égarer dans la solitude, loin de tous les bruits humains. Le paysage y manque de variété, mais il a toujours de la grandeur et même un certain charme. Autour de soi, dans l’espace limité que la ligne de l’horizon entoure de sa circonférence uniforme, on voit une immense forêt de brandes et d’autres bruyères d’espèces diverses s’élevant à 1 ou 2 mètres au-dessus du sol. Dans la saison des fleurs, ces plantes mêlent une légère nuance de rose à leur verdure délicate, mais elles sont toujours hérissées d’une multitude de brandilles dégarnies de feuilles, et noires comme si le feu les eût calcinées. Ailleurs la fougère plus haute s’est emparée du sol, et remplit l’atmosphère de son odeur pénétrante. Plus loin viennent des champs d’ajoncs et de

  1. Voyez, dans la Revue du 15 décembre 1862, l’Embouchure de la Gironde.