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faible pour un pays où tant de travaux divers ont été entrepris; mais il est très fort pour une contrée voisine d’une grande cité : : il ne faut pas oublier que pendant le même espace de temps les communes rurales des départemens pyrénéens perdaient plus de seize mille âmes par suite de l’émigration.

Si la population s’est lentement accrue, elle a du moins singulièrement gagné en bien-être, et l’aspect des plus minces hameaux suffit pour accuser le développement de la prospérité matérielle. Il existe même des villages landais de construction récente qui n’ont pas d’égaux en France pour l’heureuse distribution et la propreté. Tel est le village des Places, qui constitue la partie centrale du bourg d’Audenge, non loin de la rive du bassin d’Arcachon, La rue est bordée de chaque côté par trois rangées d’arbres divers formant de belles avenues. Entre les troncs des arbres, on aperçoit des maisons bâties en pierre de Nantes ou en minerai de fer, mais toutes blanchies à la chaux, toutes espacées à égales distances, toutes séparées les unes des autres par des jardins potagers et précédées de jardins d’agrément où des plantes exotiques épanouissent leurs fleurs. Il faudrait aller jusqu’en Amérique pour trouver une ville offrant une disposition plus régulière et plus hygiénique : on croirait se trouver dans la grande cité des mormons, la Nouvelle-Jérusalem, décrite par M. Jules Remy, et plus tard par M. Burton.

L’assainissement du sol, et par conséquent la salubrité générale font beaucoup plus de progrès que la culture, et contribuent à l’accroissement de la population. Presque toute la lande rase est maintenant soulagée de ses eaux dormantes par des fossés d’écoulement, et si ce n’est pour la traversée des bas-fonds marécageux et des ruisseaux, on pourrait facilement se passer d’échasses. Les habitans de presque tous les villages ont cessé de boire cette eau rougeâtre et chargée de détritus qu’on obtient en brisant la couche d’alios; désormais ils vont chercher l’eau à une plus grande profondeur au moyen de puits à parois imperméables et garnis au fond de couches de sable argileux et de débris calcaires servant de filtre. La pellagre est combattue dans chaque commune par l’emploi des bains sulfureux. En outre des lois ont été votées pour autoriser l’assèchement partiel des étangs du littoral et le drainage complet des marais de Vendays. Le niveau de ces réservoirs, qu’alimentent presque uniquement les pluies de l’hiver et du printemps, change au moins deux fois par an. Pendant la saison des pluies, les étangs débordent sur les terrains bas qui s’étendent à l’orient; parfois la crue verticale approche de 1 mètre et la surface d’inondation s’accroît en largeur de 1 et même de 2 kilomètres. Les débris animaux et végétaux sont poussés par le vent d’ouest dans les anses les moins profondes;