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LES
SUCCESSEURS DE COLBERT

I.
PONTCHARTRAIN.

Parmi les surprises que l’étude de l’histoire ne nous ménage guère, une des plus pénibles assurément est celle qu’on éprouve en voyant ce que devinrent immédiatement après la mort de Colbert les principes et les règlemens qu’il avait appliqués avec tant de succès à l’administration des finances et qui ont immortalisé son nom. On sait l’ordre admirable, la clarté, la régularité parfaite, l’équilibre enfin qu’il y avait introduits. Il n’est pas moins inutile de rappeler les grandes mesures dues à sa puissante initiative, la marine improvisée, l’industrie énergiquement stimulée, les codes renouvelés, les compagnies des Indes orientales et occidentales, du Levant et du Nord encouragées, Versailles et le canal du Languedoc s’achevant ensemble, nos bibliothèques et nos musées s’enrichissant d’achats faits dans le royaume et à l’étranger. Comment Colbert avait-il pu trouver dans les ressources de la France le moyen de suffire à tant de dépenses, de soutenir de si grands armemens, dont quelques-uns, dans la période de 1672 à 1678, avaient nécessité des efforts extraordinaires, et de ne laisser à sa mort qu’une dette annuelle de 8 millions de livres? Ce sont ces faits, comparés d’une part à la situation où il avait pris les finances après les déprédations de Fouquet, et d’autre part à ce qu’elles furent à la fin du règne, qui donnent sa véritable mesure; mais ces résultats glorieux n’avaient été obtenus que par une série de luttes incessantes qui l’épuisèrent.