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tempête prochaine, mais de courte durée. Si cet abaissement de la colonne barométrique s’opère en plusieurs jours, la tempête qu’il annonce tardera davantage, durera plus longtemps et sera moins dangereuse. Un abaissement de 1 à 2 millimètres en une heure présage un orage ou une forte pluie, tandis que le baromètre pourrait descendre de la même quantité dans l’espace de vingt-quatre heures sans que l’atmosphère éprouvât de perturbation sensible. On comprend d’après ces données comment le baromètre permet de prévoir la pluie et le beau temps un jour, plusieurs jours quelquefois même avant que les changemens ne s’accomplissent. Néanmoins les indications qu’il fournit à l’avance n’ont une valeur réelle que pour les marins et les habitans des plaines. Dans les montagnes en effet, trop de circonstances locales exercent leur action sur la marche des vents. Les courans atmosphériques, s’ils ne s’élèvent pas à plusieurs milliers de mètres au-dessus du sol, sont arrêtés ou détournés de leur course. Chacun sait qu’une vallée peut être le théâtre d’un violent orage sans que l’atmosphère soit troublée dans les vallées contiguës. Dans les montagnes, ce sont les effets locaux qui prédominent, tandis que sur les mers et les plateaux ils ne parviennent que rarement à masquer les mouvemens généraux de l’air.

Il y a longtemps que l’on connaît l’influence exercée sur le baromètre par les changemens de temps et que l’on observe les oscillations de la colonne barométrique pour en conclure tant bien que mal l’arrivée prochaine d’une tempête ou le retour du beau temps; mais cet utile instrument était peu répandu et n’était guère à la portée de tous les marins. Les pêcheurs des petits ports de mer n’en connaissaient pas l’usage, et cependant ils en avaient besoin plus que qui que ce soit, car ils s’aventurent en mer sur des barques d’un faible tonnage. Depuis quelques années, le gouvernement anglais a fait distribuer des baromètres dans tous les villages habités par des pêcheurs, avec une instruction claire et précise qui en indique l’emploi. De la Manche jusqu’aux Shetlands, on en trouve partout sur les côtes de l’est et de l’ouest. Quelques grands propriétaires, guidés par des sentimens d’humanité, entre autres le duc de Northumberland, ont voulu concourir à cette œuvre utile, et ont fait poser à leurs frais des baromètres dans les localités auxquelles ils portaient un intérêt d’affection. Enfin l’institution des bateaux de sauvetage[1] en a aussi fourni à toutes ses stations. Ces efforts n’ont pas été sans fruits. Il est certain que, déduction

  1. Cette association de bienfaisance est peu connue et rend cependant d’immenses services sur les côtes de la Grande-Bretagne. Fondée et soutenue par des souscriptions particulières, elle a dépensé déjà près de 2 millions de francs en achats de bateaux de sauvetage et en récompenses aux marins qui les montent. Elle possède aujourd’hui plus de cent vingt stations, et se vante d’avoir sauvé la vie à 1,500 naufragés pendant les trois dernières années.