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à l’atmosphère quand ils ne le trouvent plus dans les solutions. Les fermentations nous font donc découvrir deux classes d’animaux inférieurs, les uns se nourrissant d’oxygène, les autres vivant sans ce gaz : tous sont propres à activer la décomposition des corps, et souvent leur action est concomitante. En voici un exemple qui nous montrera encore la fermentation déterminée par un animalcule capable de vivre sans oxygène libre. Qu’on mette du tartrate de chaux sous l’eau avec quelques phosphates ammoniacaux et alcalins, on verra au bout de peu de temps se développer de petits infusoires, le monas le bacterium termo, etc. ; ces petits animaux bourgeonnent rapidement en présence des phosphates : très avides d’oxygène, ils soustraient promptement toute la portion de ce gaz qui est en dissolution dans la liqueur. C’est au moment où toute trace de l’oxygène libre a disparu que paraissent les fermens qui vivent sans oxygène. Le tartrate est bientôt dévoré et il est remplacé par un dépôt formé uniquement d’une multitude de vibrions (le vibrion tartrique paraît être différent du vibrion butyrique); pendant que la fermentation est en train de s’opérer, ces petits êtres se reproduisent rapidement par fissiparité et s’agitent sans cesse en replis flexueux. Les infusoires qui, au début de l’opération, ont les premiers troublé le liquide restent à la surface, et servent en quelque sorte d’écran contre l’oxygène atmosphérique en l’empêchant de se dissoudre dans l’infusion. Il y a un moment où les deux espèces d’infusoires peuvent se développer en même temps, les uns au-dessous des autres, les uns dans l’oxygène, les autres hors de l’oxygène.

Plus on étudie les fermentations, mieux on s’assure que l’atmosphère ne joue directement qu’un rôle tout à fait secondaire dans les phénomènes qui déterminent le retour des matières organiques à l’état inorganique. Tant qu’il n’agit que comme réactif chimique, l’oxygène brûle avec une remarquable lenteur les matières que les fermens animés dissocient avec une si étonnante rapidité. Qu’on enferme des infusions organiques en vase clos et dans une atmosphère inféconde ou privée de germes, et l’on sera vraiment surpris de la lenteur avec laquelle cette atmosphère artificielle se dépouillera de son gaz oxygène. M. Pasteur cite à cet égard les expériences les plus concluantes. De l’eau sucrée mêlée de levure de bière et conservée dans une atmosphère formée d’air ordinaire, mais où accidentellement il ne s’est point trouvé de germes féconds, est demeurée intacte pendant trois ans, et l’air du ballon fermé où pendant ce temps la liqueur avait été conservée n’avait perdu que les trois centièmes environ de son gaz oxygène. Dans des circonstances semblables, M. Pasteur a retrouvé de l’urine à peu près