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en passant de M. de Montalivet à M. Rouland. Aux termes du rapport de 1831, elle doit être composée « des ouvrages qui auront été jugés les plus propres à l’enseignement primaire en France ou dans les pays étrangers. » Il ne s’agit donc pas d’imposer à tous les instituteurs les mêmes livres; au contraire, on mettra tous les livres sous leurs yeux, à leur portée, afin qu’ils puissent faire leur choix en connaissance de cause. En un mot, M. de Montalivet traite les instituteurs comme des maîtres, et non comme de simples rouages administratifs. Vingt ans plus tard, l’Université professe encore la même doctrine. On fit dans une circulaire ministérielle en date du 21 novembre 1851 : « Il importe de laisser à chaque instituteur la liberté de choisir l’ouvrage qu’il comprend le plus facilement, qui lui paraît le mieux approprié aux besoins de son enseignement, aux habitudes de la localité, à l’âge et aux dispositions des enfans; il convient aussi de ne pas faire obstacle aux efforts des auteurs, qui seraient complètement découragés s’ils savaient d’avance que toutes les voies leur sont fermées. » Assurément on ne saurait mieux dire; mais le ministre de 1851 est M. Charles Giraud, c’est encore l’Université de 1831 qui parle. Voici ce que dit celle de 1862 par la voix de M. Rouland : « L’acquisition des livres de classe sera faite par les instituteurs sur une liste préparée chaque année pour toutes les écoles du ressort par le conseil académique, et arrêtée par le ministre. Cette liste ne devra comprendre que des ouvrages approuvés par le conseil impérial de l’instruction publique[1]. » Passe encore pour l’approbation du conseil impérial : c’est une vieille pratique universitaire rendue de nouveau obligatoire par l’article 5 de la loi du 15 mars 1850; mais que le conseil académique fasse un choix sur cette liste passablement étendue, que par surcroît ce choix soit soumis au ministre, et il est bien à présumer que l’instituteur n’aura plus qu’à se soumettre humblement. Il prendra les livres de classe de la main des magistrats et des notables qui composent le conseil académique, et qui, étant placés plus haut que lui dans la hiérarchie administrative, doivent posséder à un bien plus haut degré la science de la pédagogie.

Voyons ce que sera la bibliothèque communale placée par M. Rouland à côté de la bibliothèque classique ainsi composée. « La bibliothèque scolaire comprendra, dit l’arrêté (art. 3) : 1° le dépôt des livres à l’usage de l’école (c’est la bibliothèque classique dont nous venons de parler); 2° les ouvrages concédés à l’école par le ministre de l’instruction publique; 3° les livres donnés par les préfets au moyen de crédits votés par les conseils-généraux ; 4° les ouvrages

  1. Arrêté du 1er juin 1862.