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paroles aigres-douces; mais le l’accommodement ne se fait pas attendre, et c’est la Pologne qui en fait invariablement les frais.


« Le roi de Prusse, dit M. Harris, a pris possession de la Prusse polonaise avec une rapidité surprenante... il a déjà levé dans le pays cent mille livres sterling. » Dépêche du 21 novembre 1772.)

« ….. Les troupes prussiennes s’avancent en Pologne beaucoup au-delà des limites qu’elles s’étaient d’abord assignées, et il y a lieu de craindre que le roi de Prusse ne veuille s’emparer des palatinats de Posen et de Kalish, sous le prétexte qu’ils faisaient autrefois partie du duché de Glogau. Les Autrichiens, de leur côté, étendent leurs possessions bien au-delà de ce qui avait été fixé par les lettres patentes de l’impératrice-reine et traitent les Polonais, sur le territoire qu’ils occupent, avec autant de rigueur qu’en montrant ailleurs les Prussiens……………………

« Il y a encore, dans les mains des troupes prussiennes, une immense quantité de monnaie de bas aloi que les Polonais sont obligés d’accepter, mais dont le roi ne permet pas le cours dans ses nouvelles acquisitions. J’ai entendu calculer l’autre jour qu’il a déjà tiré de la Pologne plus de quatre millions sterling. » (Dépêche du 21 novembre 1772.)

« ….. J’ai lieu de croire qu’une grande partie du traité de partage n’a pas encore reçu son exécution, et que ce qui reste de la malheureuse république de Pologne, à très peu d’exceptions près, tombera entre les mains des puissances copartageantes. — Le roi de Prusse, à ce qu’on m’assure, est si ardent pour ce projet, qu’il a résolu de n’en pas différer la réalisation au-delà du printemps prochain. C’est dans cette unique intention qu’il a mis son armée sur un pied complet de guerre, afin d’être en état aussi bien d’intimider les Polonais que de résister à toute puissance qui voudrait lui faire opposition. Toutefois il n’en redoute d’aucun côté, l’empereur s’accordant avec lui de tous points, et la Russie paraissant dévouée à ses intérêts. » (Dépêche du 26 décembre 1772.)


Frédéric ne peut se résigner à ne pas mettre la main sur Dantzig, et on l’aurait probablement surpris autant qu’irrité, si on lui avait annoncé dès lors que la Prusse attendrait jusqu’en 1793 cette part du gâteau dont parle Voltaire. La lutte qui se livre, chez le roi de Prusse, entre l’avidité et la prudence nous est vivement peinte par M. Harris.


« ….. L’intérêt que la cour de Russie paraît prendre au sort de Dantzig a convaincu le roi de Prusse que l’impératrice ne consentirait pas facilement à le laisser s’emparer de cette ville. Cela, joint au refus fait par les magistrats d’entrer en négociation avec M. Richard, a fort dérangé ses projets, car on me garantit que, sans cette opposition de la Russie, il aurait employé la force à Dantzig, sauf à alléguer ensuite comme motif soit les anciens droits de sa famille, soit quelque infraction de la part de l’Autriche au traité de partage, qui l’autoriserait de son côté à n’en pas respec-