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Telle était la situation quand fut signé le traité de Paris le 30 mai 1814. Ce traité nous rendait nos droits sur Madagascar, car l’article 8 stipulait la restitution des établissemens de tout genre que nous possédions hors de l’Europe avant 1792, à l’exception de certaines possessions au nombre desquelles ne figure pas l’île africaine ; mais, cet article portant en même temps cession à la Grande-Bretagne de l’Ile-de-France et de ses dépendances, quelques personnes prétendirent que cette cession comprenait les établissemens de Madagascar, comme ayant été rangés parmi les dépendances de l’Ile-de-France antérieurement à 1792. Sir Robert Farquhar, alors gouverneur de Maurice, soutint vivement cette opinion.

Cette interprétation erronée du traité de Paris donna lieu à un échange de notes entre les cours de France et d’Angleterre. Cependant le gouvernement anglais reconnut que la prétention élevée par son représentant, sir Robert Farquhar, n’était nullement fondée, et il ordonna à ce fonctionnaire de remettre immédiatement à l’administration de Bourbon les établissemens que le gouvernement français possédait sur les côtes de l’île de Madagascar avant l’année 1792[1]. A la suite de cette rétrocession, le ministre de la marine nomma une commission pour examiner quel parti la France pouvait tirer de ses anciennes possessions de Madagascar. Cette commission proposa de fonder un établissement colonial sur la côte orientale « pour étendre les relations de notre commerce, donner une plus grande activité à notre navigation, ouvrir des débouchés aux produits de l’agriculture et de l’industrie, et fournir des moyens d’existence à l’excédant de la population du royaume, qui commençait à prendre un accroissement inquiétant pour l’avenir[2]! »

Le plan consistait à s’établir d’abord dans l’île de Sainte-Marie, séparée de la grande terre par un bras de mer très étroit, et qui possède une belle rade, d’un accès facile en tout temps, puis, aussitôt que ce premier établissement serait consolidé, à occuper le port de Tintingue, situé en face de Sainte-Marie, sur le littoral de la grande île, et susceptible de devenir un grand arsenal maritime, à s’avancer de là et à s’étendre dans l’intérieur au fur et à mesure que les moyens de colonisation seraient assurés, à employer

  1. Lettre de lord Bathurst à sir R. Farquhar, datée du Colonial office le 18 octobre 1816. Dans une dépêche du 31 décembre 1810 adressée au commandant pour le roi à Bourbon, M. le vicomte Dubouchage, alors ministre de la marine, en chargeant ce fonctionnaire d’entrer en négociations avec le gouverneur de Maurice pour la rétrocession de Madagascar, lui prescrit de demander la restitution pure et simple de l’île de Madagascar comme ayant été laissée à la France en toute propriété par le traité du 30 mai 1814.
  2. Mémoire présenté par M. Forestier, conseiller d’état, vice-président du comité de la marine, 20 mai 1817.