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regarder comme le fondement de l’éducation libérale, n’y furent introduites que plus tard, à l’imitation de la France et de l’Angleterre. Ces études commençaient par le trivium, grammaire, dialectique et rhétorique, et on gagnait ainsi le titre de bachelier; on passait ensuite aux arts du quadrivium, qui comprenait l’arithmétique, la géométrie, l’astronomie et la musique, celle-ci n’étant pas d’ailleurs la science de l’harmonie des sons, mais une sorte de branche de l’arithmétique, ainsi que l’entendaient certains auteurs grecs. Le trivium et le quadrivium, dans les idées cabalistiques du temps, correspondaient aux deux côtés trois et quatre d’un triangle rectangle; on y trouvait aussi une liaison mystique avec le nombre sacré des Hébreux et le diagramme nuptial des Égyptiens. En réalité, cette division correspond exactement aux deux groupes de nos connaissances, puisqu’elle sépare les lois qui règlent les quantités et les proportions des lois qui régissent l’expression correcte et précise de nos pensées.

Une vive émulation régnait entre ces diverses universités, nées dans des républiques rivales et qui étaient souvent en guerre. Cette concurrence tourna quelquefois au profit des lettres et des sciences, mais encore plus à l’avantage de ceux qui les enseignaient : les professeurs marchandaient au sujet de leurs appointemens, et ne s’engageaient à rester dans une université que pour un certain nombre d’années; ils menaçaient de partir pour une ville rivale, quand ils voulaient faire augmenter leur traitement. Il se formait même des espèces d’entrepreneurs qui réunissaient une compagnie, une troupe de professeurs, et concluaient des arrangemens d’une part avec ceux-ci, de l’autre avec les villes qui voulaient fonder ou agrandir leur université. On s’occupait surtout de rendre la vie des étudians facile et peu coûteuse. Ainsi, à Bologne, à Padoue, la ville leur fournissait des chambres à un prix modéré, et les exemptait de payer des droits de douane pour leurs effets et leurs vivres. Ils jouissaient aussi de grands privilèges, tels que celui de porter des armes nuit et jour, d’avoir une juridiction spéciale, et de nommer parmi eux soit un recteur, soit un juge qui présidait un tribunal formé de délégués des différens collèges nationaux.

On vient de voir comment le mouvement bolonais s’était propagé dans les différentes cités de la péninsule, surtout dans l’Italie centrale et septentrionale. L’université de Naples nous offrira maintenant quelques traits particuliers. Elle fut fondée en 1224 par l’empereur et roi Frédéric II. Dès l’origine, on y trouve le germe des facultés; elle avait des chaires pour le droit civil et canonique, d’autres pour la philosophie et les mathématiques, d’autres encore pour la médecine. Un étudiant n’y était reçu docteur en médecine qu’après avoir fait trois années de philosophie et cinq de médecine