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vaine formalité et qu’on ait fait docteurs « des lâches et des ignorans qui n’auraient jamais dû obtenir ce grade. » Les choses en arrivèrent au point que la faculté de conférer le doctorat devint le privilège exclusif de la famille des Caraccioli, princes d’Avellino. Ces princes, on le conçoit, ne se montraient pas difficiles sur le choix des docteurs et ne cherchaient qu’à grossir les revenus qu’ils tiraient de cette charge[1]. On ne s’étonnera donc pas que l’université de Naples soit tombée en décadence, et qu’elle ait fini par perdre tout crédit, bien que des hommes célèbres, comme Della Porta, Colonna, Léonard de Capoue, aient encore de temps en temps jeté sur elle quelque lustre.

Nous ne terminerons pas cette rapide esquisse de l’histoire des anciennes écoles italiennes sans dire quelques mots de l’université de Pise. Elle a acquis une réputation toute spéciale par la direction scientifique qu’y prirent les études dès sa fondation, et elle peut revendiquer une grande part d’influence dans ce mouvement fécond qui renouvela la science, et qui fonda sur la méthode expérimentale la philosophie naturelle. Galilée est l’inventeur de cette méthode et le fondateur de cette école. Dès l’année 1344, une bulle pontificale parle de l’université de Pise, qui avait commencé comme les autres par l’enseignement des pandectes et du droit canonique ; elle y ajouta bientôt des cours de cosmographie et de médecine. C’est surtout à la fin du XVe siècle, sous Laurent de Médicis, que cette université prit un grand développement. À cette époque fut bâti le palais de la Sapienza, qui est encore aujourd’hui le bâtiment principal de l’université, et une somme de 6,000 florins, environ 72,000 francs, fut affectée au paiement du recteur et des professeurs. Malheureusement l’air de la ville à cette époque n’était pas salubre, et la peste y faisait de fréquens ravages, de telle sorte que l’université tout entière dut se transporter pendant une épidémie dans une autre ville de la Toscane. La vie était d’ailleurs beaucoup plus chère à Pise qu’à Bologne et à Padoue, et enfin, s’il faut en croire les anciens chroniqueurs, les habitans montraient un caractère peu sociable. Pour toutes ces raisons, l’université de Pise n’a jamais eu un grand nombre d’élèves : en 1474, on y comptait 220 étudians en droit et environ 100 étudians en médecine ; en 1486, leur nombre total était de 460 : c’est le chiffre le plus élevé que l’on trouve dans les histoires du temps. Pise, comme toutes les autres villes d’Italie qui possédaient une université, a eu des collèges de différentes nations, fondés soit par des évêques, soit par des particuliers, et plusieurs de ces collèges ont subsisté jusqu’à ces dernières années. Les étudians, quand ils étaient reçus docteurs, payaient à la caisse de l’université 4 florins (environ 48 francs) et aux examinateurs 3 florins. Il

  1. Ce système a duré jusqu’à la fin de 1804.