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Caton, et l’autre par le père des Gracques, la basilique Sempronia. La fondation de ces monumens se lie ainsi à l’histoire de ce temps, dont les principaux représentans sont Caton et les Gracques.

Le même progrès de l’influence financière dans la société romaine avait fait remplacer les boutiques de bouchers, situées dans le Forum, du côté de la Curie, par les bureaux des changeurs et des prêteurs, qu’on appelait argentariœ novœ. C’est derrière ces boutiques qu’était la basilique Porcia; elle touchait à la Curie, et brûla avec elle dans l’incendie causé par les funérailles de Clodius. Des bureaux de banque et une basilique, lieu consacré aux affaires, placés ainsi tout près du temple, du sénat et du comitium patricien, montrent que l’illustration de la naissance souffre à côté d’elle l’ascendant dû à la richesse, et offre une vive image du rapprochement qui s’opère entre l’aristocratie héréditaire et l’aristocratie de l’argent. Caton, pour faire sa basilique, acheta pour l’état deux atria, dont on ne sait pas bien la destination, et quatre boutiques. Dans la création de cet édifice d’une utilité populaire, il éprouva de grandes difficultés de la part des ennemis que sa rigueur lui avait faits, et en particulier de la part de Titus Flamininus, le prétendu libérateur de la Grèce, frère de ce Lucius Flamininus, si justement expulsé du sénat par Caton; mais l’opiniâtre volonté du censeur triompha de tout.

Caton passa la dernière partie de sa vie tantôt dans son champ de la Sabine, tantôt à Rome, grondant les sénateurs dans la Curie, tançant le peuple à la tribune, plaidant sans cesse le plus souvent pour accuser, quelquefois pour se défendre, et trouvant au milieu de tout cela le temps d’écrire plusieurs ouvrages, dont les principaux furent un traité sur l’agriculture, qu’il pratiquait avec passion, et une histoire des premiers siècles de Rome, qui étaient pour lui l’âge d’or de la république, et auxquels on peut dire qu’il appartenait par l’âme et par les idées, étranger à ce qu’il y avait de bon et de mauvais dans son temps, homme du passé auquel il avait survécu, et par le fait de sa longue vie devenant de plus en plus, pour les générations qu’il traversait, une exception et un anachronisme. Le succès qu’obtinrent les trois philosophes envoyés par Athènes l’irrita beaucoup, et il ne respira que quand il eut obtenu du sénat l’ordre de les renvoyer d’où ils étaient venus.

In des plus détestables rois d’Egypte, Ptolémée Physcon, vint à Rome se plaindre de son frère Ptolémée Philométor, qui ne valait guère mieux que lui, et qu’il accusait d’avoir voulu l’assassiner. Le sénat, qui voulait faire durer la guerre entre les deux frères, feignit d’être touché des supplications de Physcon, qui parut devant lui en vêtemens de deuil; mais Caton n’aimait pas les rois, qu’il appelait