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ticket, qu’ils plient et déposent dans un verre. Un commis, clerk of the ticketings, ouvre alors les bulletins et proclame le plus haut chiffre auquel le minerai doit être adjugé. C’est, on le voit, une sorte de vente aux enchères, mais conduite avec le plus parfait silence. Le résultat du scrutin, c’est-à-dire le prix des marchandises, est publié le lendemain par les journaux. Le cuivre ainsi acheté est plus tard envoyé par eau dans la principauté de Galles, le plus souvent à Swansea, où s’élèvent d’immenses fonderies, copper smelting works. La raison pour laquelle le cuivre n’est point fondu en Cornouaille est que ce comté ne fournit point de charbon de terre.

L’ouest de l’Angleterre doit très certainement la plus grande partie de ses richesses à la présence des métaux ; mais que serait ce capital dormant dans le sein de la terre sans l’énergie et l’habileté de ses mineurs ? Ceux de la Cornouaille constituent surtout une race d’élite ; on reconnaît encore à première vue des paysans, tant ils se distinguent par la stature et par un air de réflexion et de confiance en eux-mêmes. Cette supériorité physique et morale tient à la nature de leurs travaux, qui développent les forces du corps, mais qui exercent encore plus le jugement, l’intelligence et toutes les facultés de l’esprit. Les enfans de mineurs vont généralement à l’école jusqu’à dix ou douze ans. Passé cet âge, ils entrent dans la mine, où ils travaillent d’abord à la surface ; puis, la jeunesse et les forces venant, ils descendent peu à peu sous terre. Au bout de quelque temps, ils connaissent aussi bien la valeur des minerais et la manière de les poursuivre que les savans eux-mêmes. On a dit des mineurs de la Cornouaille qu’ils possédaient les mathématiques de la taupe. Doués en effet d’une sorte d’instinct et d’un coup d’œil admirable, ils trouvent moyen de résoudre dans la pratique certains problèmes qui semblent exiger tous les calculs de la géométrie. À quelle hauteur atteindrait cette pénétration d’esprit, si elle était aidée par l’étude ? Malheureusement c’est une question à laquelle il est difficile de répondre, car à peine ont-ils mis le pied dans la mine qu’ils n’ont plus, pour compléter une éducation bien imparfaite, que les cours du soir et les écoles du dimanche, sunday schools. Dans ces dernières, ils apprennent tout au plus à lire la Bible. Depuis quelques années, un professeur de Londres, M. Robert Hunt, archiviste du Practical geology Muséum, a établi en Cornouaille une association des mineurs, miners association, dont les membres peuvent assister à des cours de chimie, de minéralogie et de géologie. Cette institution rend des services, mais elle rencontre plus d’un obstacle dans certains préjugés retranchés derrière l’ignorance et la routine. Chez lui, le mineur s’occupe plus ou moins de son jardin, où il cultive des fleurs et des légumes. Sa maison, qu’il a très souvent bâtie lui-même,