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vertus, ont pu franchir ce passage; mais c’étaient des enfans des dieux. »

……. Pauci quos œquus amavit
Jupiter, aut ardens evexit ad œthera virtus,
Dis geniti, potuere. Tenent média omnia sylvae,
Cocytusque sinu labens circumvenit atro.

Pour faire remonter le courant à une nation qui semblait presque prendre goût à le descendre, il fallait de vaillans efforts et une indomptable énergie. Dans la presse jusqu’alors silencieuse ou peu écoutée, des écrivains jusqu’alors inconnus ou déjà éprouvés, passant, malgré le danger du naufrage, entre tous les écueils, reprirent faveur auprès du public, et quelques-uns eurent le don de le captiver par l’emploi heureux de toutes les ressources de l’art de bien dire. Dans le corps législatif, cinq députés opposans essayaient leurs armes en face des puissans orateurs du gouvernement, qui eux-mêmes donnaient un nouvel éclat à la lutte, et ils se multipliaient pour conjurer le mal de l’indifférence politique. A côté d’eux, il y eut une minorité longtemps docile qui s’émancipa, et qui dans plus d’une occasion importante donna le témoignage que le dévouement n’exclut pas toujours la désapprobation. Une génération nouvelle, indépendante sans être hostile, moins préoccupée de savoir qui la gouvernera que de s’assurer comment elle sera gouvernée, ne pouvant pas se résigner à l’inaction avant d’avoir agi, était peu à peu impatiente d’entrer en scène. Des comités consultatifs, formés en vue des élections, lui servaient de généreuse avant-garde. Toutefois, pour se remettre en mouvement, l’opinion publique, cette ancienne rebelle convertie à l’obéissance, avait en quelque sorte besoin d’entendre le commandement de marche, et c’est l’empereur Napoléon III qui a paru le lui donner. Après avoir fait rentrer dans son gouvernement les premiers germes de la discussion parlementaire qu’il avait jusqu’alors éliminée et les garanties de contrôle financier auparavant refusées, fatigué sans doute d’être plus loué que conseillé, plus servi que soutenu, il n’a pas craint de déclarer qu’il restait beaucoup à faire pour perfectionner les institutions et accoutumer le pays à compter sur lui-même. Jouissant du privilège de pouvoir tenir publiquement le langage dont il lui convient de se servir sans avoir à en rendre compte à personne, il a signalé du haut du trône les enseignemens que l’Angleterre donnait à la France par le libre jeu de ses institutions, et il a laissé tomber cette parole qui pouvait être recueillie comme un programme : « travaillons de tous nos efforts à imiter de si profitables exemples. » A côté de lui, un ministre de l’intérieur, rapportant de son séjour au milieu du peuple anglais le goût de ces libertés que nous