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résistance depuis les événemens de Mexico. Un homme habile et d’un libéralisme modéré, qui a paru quelquefois être un rival pour M. Juarez, qu’on a cru récemment disposé à s’entendre avec l’intervention, et qui nourrit peut-être la pensée secrète de se mettre à la tête d’un parti national pour traiter avec nous, M. Manuel Doblado, renfermé dans son état de Guanajuato, s’adressait, lui aussi, aux populations sur lesquelles il règne. « Je fais un appel, disait-il, à tous les habitans de l’état, conservateurs, modérés et libéraux, pour qu’ils servent, chacun dans sa sphère, la cause de l’indépendance. La question de parti n’existe plus. Désormais doivent disparaître avec les haines politiques toutes les funestes dénominations nées de la guerre civile. Dans la lutte sanglante où nous sommes lancés, il n’y a plus que deux camps, Mexicains et Français, traîtres, envahisseurs et envahis... Je n’ai point la jactance de vous annoncer des triomphes et d’énumérer des forces imaginaires. Notre faiblesse est un fait, et c’est ce fait même qui a motivé l’invasion; mais notre devoir est de nous défendre... » En réalité, quelques progrès qu’ait faits l’intervention dans ces derniers temps, on peut dire que la défense n’est point épuisée, de telle sorte que le problème ne cesse de subsister dans ce qu’il a de plus sérieux. Dans cette phase nouvelle, c’est encore la question tout entière de l’intervention, de sa nature, de ses limites; elle se relève avec cette complication de moins de l’honneur des armes à venger, avec tout ce cortège de difficultés matérielles et morales qui intéressent notre politique dans le Nouveau-Monde et en Europe.

Et d’abord c’est cette difficulté première de la pacification du Mexique, d’un pays immense où chaque marche est comme une conquête nouvelle. Sans doute l’intervention étend par degré son influence. Le vote monarchique de Mexico a retenti dans un certain nombre de villes. Des populations entières semblent disposées à se rallier à un drapeau de conciliation, et il est évident que l’action de la France ne peut qu’être bienfaisante. Sans doute aussi la résistance de M. Juarez et de son parti n’est point inépuisable: elle existe cependant, elle s’étend à des provinces entières; elle a pour soldats tous ces partisans qui se répandent dans le pays, qui le dévastent et le rançonnent le plus souvent sous prétexte de défendre son indépendance. On pourra avoir raison de ces bandes toutes les fois qu’on les atteindra; mais c’est là justement la dangereuse alternative qui se présente, de laisser le champ libre à la multitude de guérillas, ou de disséminer, d’épuiser des forces fractionnées à la poursuite d’un ennemi insaisissable, et il y a ici un fait curieux à observer, qui se reproduit invariablement et à chaque