les distractions, à toutes les ivresses; mais ton image me poursuivait partout, dans le monde, sur la scène... Mon cœur est resté plein de toi.
Pardonne-moi mes torts involontaires : la nécessité était là, impérieuse, implacable... Noirmont a dû te dire...
Pendant deux ans, le cruel oncle a été impénétrable... Ce n’est que ce matin qu’il m’a conté !... Mais j’écoutais si peu les raisons qu’il donnait pour me décidera partir !... Un ancien ami de ta famille t’a fait son héritier, à la condition d’abandonner ton beau nom de Joyeuse et de prendre le sien. N’est-ce pas cela?
Ah! mon Dieu, oui! C’est à n’y rien comprendre! Une immense fortune! Encore aujourd’hui c’est un mystère que je ne m’explique pas. (Il va décrocher un médaillon suspendu près de la glace et le montre à Pompéa. Plaisantant.) Tiens, voici le portrait du barbare qui nous a séparés.
C’est là le comte Herman, l’homme au testament? Et tu n’as rien deviné?
Que veux-tu que je devine?
Tu n’as pas le plus léger soupçon? (Lui remettant d’une main le portrait, de l’autre l’attirant devant la glace.) Jette un coup d’œil sur cette miniature, et regarde-toi dans la glace.
Ah!
Au fait, je pardonne à présent au comte Herman d’avoir exigé que tu prisses son nom.
Trêve aux plaisanteries!
J’ai tort... Mais toi, cruel, pourquoi ne m’avoir pas écrit une fois durant ta longue absence ?
Je m’y étais engagé par serment : c’était une condition du testateur.
Et sans doute ton mariage aussi?
Non. A mon arrivée en Allemagne, j’étais triste, abattu ; un hasard de voisinage m’a mis en rapport avec Mme et Mlle de Blümenthal ; peu à peu j’ai senti que près de cette charmante personne je devenais meilleur; j’ai apprécié ses excellentes qualités, je l’ai estimée, puis aimée d’un amour inconnu, confiant, impérissable; je l’ai épousée, et depuis près d’un an elle m’a donné un fils que j’adore autant que sa mère.
Ah ! c’est sérieux?