Ainsi vous croyez à la vertu de Mlle Pompéa?
Eh ! quelle raison avez-vous de ne pas y croire?
Moi? aucune. La compensation aux souffrances de votre sœur sera du moins le départ de ces chanteuses ancienne et nouvelle.
Vous êtes bien rigoriste.
C’était votre opinion hier matin, je l’ai conservée. Au surplus, cher fiancé, voilà plus d’un an que nous sommes promis l’un à l’autre; ne trouvez-vous pas que c’est un peu long?
Vous savez bien, chère Emma, qu’il y a quelques mois à peine nous étions encore en deuil de ma mère; mais mes engagemens sont sacrés, et je ne crois pas que personne soit en droit de me soupçonner de vouloir y manquer....
Vous me comprenez mal, mon noble cousin : ce que je veux dire, c’est que, depuis un an, nous avons épuisé ensemble l’idéal, la poésie de l’amour; maintenant il ne reste plus que la partie prosaïque, bien peu digne de nous... Que penseriez-vous si nous nous rendions l’un à l’autre une entière liberté?
En vérité, Emma, vous avez tort d’être jalouse.
Moi! Et de qui?
Cela se voit de reste, de Mlle Pompéa.
Et de vous?
Sans doute ; hier soir ces messieurs l’avaient remarqué comme moi.
Ah! c’est l’opinion d’Herman et du comte de Noirmont !
Je n’avais pas besoin de leur avis; votre dépit était assez visible.