Page:Revue des Deux Mondes - 1863 - tome 48.djvu/892

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

dans une haine commune contre Charles Ier les presbytériens écossais conduits par Leslie et les troupes parlementaires commandées par Cromwell. La mélodie que Ritson nous a conservée est sauvage comme les paroles et adaptée aux modulations bizarres de la cornemuse.

« Marche ! marche ! de par le diable ! En avant ! Attention, enfans ! chacun à son rang ! Carabiniers, sur le front, jusqu’au de la des borders ! Là, soyez fermes au poste et combattez en hommes de cœur pour la défense du véritable Évangile. Le parlement se réjouit en vous voyant venir. Allons purger l’église des reliques papistes et de toutes ces innovations maudites. Le bon droit est pour nous, enfans de la vieille Écosse.

« Jenny rapportera le capuchon, Jockie la chasuble, et nos joueurs de cornemuse auront le coffre aux sifflets[1], toutes choses qui font chez eux un prêtre. Allons, enfans, retroussez vos plaids et relevez vos bonnets. En avant, en avant ! »

Il y a cependant une chanson républicaine sur la bataille de Naseby qu’on chercherait en vain dans les recueils du temps et dans les Ballads of the Commonwealth, publiées par M. Wright, mais qui vaut la peine d’être reproduite. L’auteur vient de décrire l’attaque du prince Rupert, qui a fait plier le centre de l’armée de Cromwell :

« Mais écoutez, écoutez ! Quel est ce piétinement de chevaux derrière nous ? Je reconnais cette bannière… Enfans, c’est lui ! Loué soit Dieu ! Le brave Olivier est ici. Nous allons changer de manœuvre.

« Tous à la fois baissant leurs têtes, pointant leurs sabres en avant, comme l’ouragan contre les arbres, comme un déluge dans les fossés, nos cuirassiers s’élancent sur les rangs des maudits, et du choc ont dispersé leurs forêts de piques.

« Vite, vite ! les galans se sauvent pour cacher dans quelque coin leurs têtes pusillanimes destinées à pourrir sur la porte de Temple-Bar. Et lui,… il tourne bride et fuit. Honte à ces yeux cruels qui contemplaient la torture et qui craignent de regarder la guerre en face !

« Holà ! camarades, balayez la plaine, et avant de dépouiller les morts, assurez-vous de votre homme par un bon coup de pointe. Puis arrachez de leurs manches et de leurs poches ces médaillons et ces pièces d’or, gages d’impures amours ou dépouilles du pauvre.

« Insensés ! l’or brillait sur vos pourpoints, vos cœurs étaient légers et hardis, lorsque ce matin vous baisiez les blanches mains de vos maîtresses, et demain le renard conduira hors de sa tanière ses fauves rejetons qui viendront en hurlant s’abattre sur vos cadavres.

« Où sont ces langues qui naguère raillaient le ciel et l’enfer, ces doigts qui se jouaient impatiens sur la garde de vos épées ? Où sont vos habits de satin parfumés, vos comédies et vos sonnets ?

  1. Les orgues, allusion injurieuse à la liturgie catholique.