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des démocrates allemands avec le National Verein à leur tête, et de tels chefs, très habiles agitateurs, il est vrai, ne règnent cependant pas encore en maîtres sur toute l’Allemagne. Leurs agens s’entendent à merveille à faire signer des adresses et à répandre des pamphlets ; pourtant, dans les duchés, ils n’ont réussi ni à soulever le Lauenbourg, qui reste entièrement fidèle au nouveau roi Christian IX, ni à disposer en leur faveur une partie même du Slesvig : dans le Holstein seulement, ils ont recueilli un certain nombre d’adhésions en faveur du duc Frédéric d’Augustenbourg. En Allemagne, il est curieux de voir les combats qu’ils ont à livrer contre les dispositions des classes moyennes, dès qu’il s’agit de passer à l’action, et contre celles des grandes cours, mises en défiance contre toute témérité. Leur mécontentement est extrême par exemple contre la bourgeoisie de la ville libre de Hambourg, où le directeur de la police a recommandé la réserve aux journaux et interdit les meetings et les levées de corps francs. Les violentes harangues et les placards injurieux n’ont pas manqué contre ces magistrats d’une ville allemande qui osaient douter du droit national contre le Danemark, contre ces banquiers où les souscriptions populaires trouvaient fort mauvais accueil, contre ces riches négocians enfin auxquels « le souffle empesté du dieu Mammon a fait perdre le sens, » et qui, par un mauvais calcul, « paieront plus cher leur perfidie envers la patrie allemande qu’ils n’eussent payé une juste rupture avec un ennemi sans pudeur. » Quant aux cours d’Allemagne, les plus petites sont, il est vrai, tout à la dévotion du National Verein, elles lui ont servi de berceau et lui préparent des asiles. Parmi celles de second ordre, on conçoit aisément que la Bavière, encore sous le coup de la révolution de Grèce, et non signataire du traité de Londres, ait une conduite fort nettement décidée, et, pour ce qui touche la Saxe, il y a peut-être lieu d’y redouter l’activité de M. de Beust : on entend dire volontiers à Dresde que ce premier ministre « a la tête trop grosse pour un royaume de cette étendue ; » mais les grandes cours, quel que soit leur besoin de popularité au milieu de leurs embarras intérieurs, ne sont pas sans réfléchir sur la responsabilité qui résulterait pour elles d’une action politique, et elles ont assez de force pour ne pas se livrer d’elles-mêmes à un entraînement extérieur et dangereux. La Prusse et l’Autriche ont ainsi fait contrepoids, dans les dernières résolutions de la diète de Francfort, à la minorité qui voulait une occupation immédiate des duchés ; à la majorité très faible, il est vrai, de 8 voix contre 7, elles ont fait décider l’exécution pure et simple en réservant la question de la succession. Toutefois la situation de MM. de Bismark et de Rechberg n’en est pas devenue plus facile en présence des chambres de Berlin et