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les efforts persévérans que le Danemark a faits pour exécuter ces engagemens et par l’opposition opiniâtre de l’Allemagne, contre laquelle ces efforts ont constamment échoué, il est difficile d’imaginer comment l’exécution des engagemens de 1851 pourrait jamais être praticable.

Sans rentrer ici dans les broussailles de la controverse dano-allemande qui dure depuis 1852, on peut ramener à quelques points simples les élémens de cette lutte. Le problème que le Danemark avait à résoudre était l’organisation de ces institutions centrales qui devaient fondre dans un tout les quatre parties de la monarchie, à savoir : le Danemark proprement dit, le Slesvig, et les deux duchés compris dans la confédération germanique, le Holstein et le Lauenbourg. Depuis que le Danemark s’est appliqué à remplir cette difficile tâche, l’Allemagne s’est obstinément appliquée de son côté à entendre l’exécution des engagemens de 1851 dans un sens contraire aux libérales institutions danoises. Pendant que le cabinet de Copenhague préparait son premier plan en 1853, les états de Holstein votaient cette curieuse déclaration : « qu’une coexistence avantageuse des diverses parties de l’état ne pouvait être obtenue que par le rétablissement d’un gouvernement absolu, avec des assemblées consultatives dans toutes les parties de la monarchie. » On peut voir dans cette instructive résolution des états holsteinois l’écho du conseil réactionnaire du prince Schwarzenberg. Avec un roi absolu à Copenhague, avec un roi qui aurait retiré aux Danois leurs libertés parlementaires, l’œuvre de l’union organique de la monarchie devenait facile ; la chose allait toute seule, et c’étaient les hobereaux du Holstein, soufflés par les cabinets allemands de 1853, qui en faisaient le naïf aveu. Ce qui était tout d’abord en question pour le Danemark, c’était sa liberté politique intérieure. Les libéraux européens ne doivent point oublier ce point de départ de la lutte. Le Danemark n’a pas voulu faire le sacrifice de sa liberté. Cette résolution généreuse, qui lui vaut ses malheurs actuels, est son titre éclatant à la sympathie des esprits libéraux de l’Europe.

La résolution des états du Holstein n’était point de la part de l’Allemagne une protestation de circonstance. Même en 1858, la diète de Francfort persévérait dans cette pensée. « L’état de choses (le gouvernement parlementaire établi en Danemark), qui est de date récente, écrivait en janvier 1858 un comité de la diète, implique pour le gouvernement royal-ducal une limitation de liberté d’action qui n’est pas compatible avec les principes de la confédération. » Le Danemark essaya d’organiser l’union par la liberté. Il donna, pour chaque partie de la monarchie, à des assemblées délibérantes la gestion des affaires locales, et remit à un parlement élu la conduite des affaires communes à la monarchie entière. L’assemblée holsteinoise et la confédération se révoltèrent contre cette loyale transaction. Ce fut alors que l’Allemagne accusa le Danemark de manquer à la stipulation de la dépêche du prince Schwarzenberg, qui disait que les diverses parties de la monarchie danoise seraient « les membres d’un tout dans lequel aucune