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même au commencement du siècle le nombre des vaisseaux de ligne à deux batteries et de 50 canons (comme le Solferino) était considérable dans toutes les flottes de l’Europe, et dès 1827 nous mettions en chantier des vaisseaux de 100 canons à deux batteries. De même encore on a vu les paquebots à vapeur partir de 600 tonneaux et de 160 chevaux, leur maximum de force, vers 1830, pour arriver à 4,000 tonneaux et 1,000 chevaux de vapeur, qu’ont aujourd’hui les navires des grands services transatlantiques. Tout cela pourtant, je le répète, ne s’est fait et n’a pu se faire que progressivement, avec le bénéfice du temps et de patientes études suivies pas à pas. En attendant, si l’on doit reproduire encore le modèle du Solferino, ne serait-il pas possible de substituer le fer au bois dans la partie de la muraille qui n’est pas protégée au-dessus de la flottaison ? S’il n’est pas quelque raison majeure pour écarter cette combinaison, elle aurait le très grand avantage de réduire dans une proportion considérable les chances d’incendie.

Quoi qu’il en soit, et si même il peut n’être pas très militaire de laisser une partie de la muraille du vaisseau exposée sans la défense de la cuirasse aux projectiles incendiaires de l’ennemi, il est tout à fait certain que le Magenta et le Solferino n’ont absolument rien perdu, au point de vue marin, à porter leurs deux batteries. Bien au contraire les qualités qu’ils ont déployées dans la navigation dépassent ce que leurs admirateurs les plus fervens avaient espéré d’eux, et, ce qui n’est pas moins précieux que la vitesse de la marche ou la douceur du roulis, ils ont trouvé dans leurs batteries des logemens exceptionnellement comfortables et sains pour les marins qui les montent. La partie non protégée de l’avant sert dans la batterie basse de logement aux maîtres, et dans la batterie haute d’hôpital ; la partie correspondante de l’arrière contient en haut l’appartement du commandant et en bas les chambres des officiers, des chambres qui ont chacune un sabord pour recevoir l’air et la lumière. Officiers et maîtres n’ont jamais été aussi bien établis sur aucun autre bâtiment de guerre.

Ce n’est pas tout, ces vaisseaux se distinguent encore de leurs aînés par la forme toute particulière de leur avant : au lieu de présenter comme sur la Gloire une sorte de fer de hache, l’avant du Solferino et du Magenta se produit dans le sens perpendiculaire sous la forme d’un angle dont le sommet est placé à un mètre environ au-dessous de la flottaison ; autrement dit, leur étrave, au lieu de continuer sa projection en avant et en partant de la quille, comme il arrive dans la plupart des constructions, fait au contraire un mouvement en arrière vers l’intérieur du navire à partir d’un mètre au-dessous du niveau de l’eau. Cette disposition a été prise