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ils me trouveront toujours disposé à leur donner des marques de ma protection. — Louis[1]. »


Le désir exprimé par Louis XIV s’explique naturellement par la crainte de fournir un nouvel aliment au procès. Dans tous les cas, ce désir étant un ordre, on peut assurer que l’autopsie n’eut pas lieu. Un mémoire de La Reynie postérieur au dernier que nous avons cité porte en marge ces mots significatifs : faits particuliers qui ont été pénibles à entendre, dont il est si fâcheux de rappeler les idées, et qu’il est plus difficile encore de rapporter. Dans ce mémoire, qui paraît avoir été écrit vers le temps où la duchesse de Fontanges dut quitter la cour, La Reynie, reprenant toutes les dépositions à la charge de Mme de Montespan, insistait particulièrement sur la tentative que deux accusés, déguisés en colporteurs, devaient faire contre la jeune duchesse au moyen d’étoffes de Lyon et de gants de Grenoble, « étant presque infaillible, disait le mémoire, qu’elle prendroit au moins des gants, les dames ne manquant guère à cela lorsqu’elles en trouvent de bien faits. » La Reynie énumérait en outre les messes sacrilèges qui auraient été dites à diverses reprises dans des masures, tantôt à Montlhéry, tantôt à Saint-Denis, à l’intention et souvent en la présence même de Mme de Montespan. Il rappelait enfin, à l’appui des faits plus récens, qu’au commencement de 1668 deux prêtres, Mariette et Lesage, avaient été introduits dans l’appartement de Mme de Thianges au château de Saint-Germain, que là Mariette, ayant son surplis et son étole, avait fait des aspersions d’eau bénite et dit l’évangile des rois sur la tête de Mme de Montespan, pendant qu’elle récitait une conjuration et que Lesage brûlait de l’encens, que le nom du roi était dans cette conjuration, ainsi que celui de Mlle de La Vallière, dont Mme de Montespan demandait alors la mort, et que plusieurs autres messes, dites dans des circonstances identiques, avaient eu le même but.

Un incident qui préoccupa La Reynie et Louis XIV s’était produit dans les premiers mois de 1680. L’abbé Lesage avait déclaré, entre autres particularités, qu’il croyait que M. de Lamoignon, qui avait dirigé le procès de la marquise de Brinvilliers, était mort empoisonné. Consulté à ce sujet par La Reynie, le fils du premier président lui répondit qu’en effet son père avait été incommodé pendant le procès de Mme de Brinvilliers, qu’il s’était beaucoup occupé de cette affaire, et qu’ayant à cette époque trouvé quelque chose de la comtesse de Soissons, celle-ci en avait témoigné un profond ressentiment ; mais cet incident n’eut pas de suite, et la comtesse de Soissons ne quitta la France que plus tard.

  1. Bibliothèque du Louvre, Ms. Cote F. 325.