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en Hindous et en Européens. Le nom commun signifiait une céréale quelconque, notre mot riz est une modification du mot sanscrit, et il est allé rejoindre en Pologne, après un étrange détour, le nom polonais du seigle, rez. En résumé, l’on peut dire que, toute part faite aux incertitudes, la flore supposée par les rapports linguistiques des peuples indo-européens atteste une région tempérée, fertile, analogue à celle que nous habitons. Le bouleau, qui ne croît pas au sud plus loin que l’Himalaya, porte le même nom en sanscrit et dans plusieurs langues européennes. Tout cela encore nous indique la Bactriane, dont Quinte-Curce (VII, 4) vante la fertilité, les beaux arbres, les beaux raisins, le bon vin et la culture variée.

La faune nous fournit des indices analogues et plus concluans. Aussi haut qu’on remonte dans l’histoire de notre race, on trouve la domestication du bœuf, du cheval, du mouton, du cochon et du chien passée à l’état de fait accompli. Il semble même que ce sont les Aryas qui ont doté le monde entier du bœuf domestique. Son nom aryen en effet se perpétue fort au-delà des limites géographiques de la famille aryenne, et c’est une loi de l’histoire des langues humaines que les noms d’animaux domestiques s’introduisent chez les peuples qui les reçoivent du dehors avec leur forme étrangère. C’est ainsi que les indigènes du nord de l’Amérique ont donné au cheval des noms où l’on reconnaît l’anglais, tandis que ceux du sud ont adopté des noms empruntés à l’espagnol. En revanche, il est douteux que nos ancêtres aryens se soient servis de l’âne. Ils semblent ne l’avoir connu qu’à l’état sauvage, et l’avoir reçu plus tard, apprivoisé et dressé, de la main des peuples sémites, chez qui, dès l’origine, il est en grand honneur. L’étymologie comparée est venue aussi confirmer une supposition récente des naturalistes qui, se fondant sur des raisons anatomiques, ont prétendu que notre cochon domestique ne descendait pas, comme on l’a cru si longtemps, du sanglier de nos forêts, mais qu’il provenait d’une espèce asiatique encore existante en Perse. Si ce dernier fait est réel, il est probable que les migrations aryennes ont amené avec elles cet animal si utile et si facile à nourrir, et c’est ce que l’étymologie des noms respectifs des deux congénères rend pour ainsi dire certain. Le chien a suivi partout nos ancêtres. Son nom, du sanscrit au celtique, est un des mieux conservés. Nos paysans du nord le prononcent encore comme leurs aïeux d’il y a quatre mille ans. L’oie évidemment, le coq et la poule probablement, faisaient partie de la basse-cour originelle. Il est très douteux qu’ils aient possédé soit le chat domestique, soit le pigeon. Le malheur a voulu qu’ils aient aussi apporté leurs parasites en Europe, qui s’y sont trouvés, paraît-il,