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ne repose que sur la confiance, et n’est qu’un capital imaginaire. Aussi, pendant que ce billet tend à diminuer dans les pays que nous venons de citer, le chiffre des dépôts s’accroît de jour en jour. En Écosse, en 1845 et 1846, Wilson, le célèbre fondateur de l’Economist, estimait à 30 millions de livres sterling ou à 750 millions de francs les dépôts en comptes courans qui pouvaient exister dans les diverses banques du pays, et dont on faisait usage par des chèques. En 1857, M. Mac-Culloch les évaluait à 50 millions de livres sterling ; ils sont au moins aujourd’hui de 60 millions de livres ou 1 milliard 500 millions de francs. En Angleterre, la somme des dépôts, qui atteignait à peine, il y a vingt ans, 100 millions de livres, était, il y a quelques années, au dire du même M. Mac-Culloch, de 200 millions de livres ; elle est aujourd’hui certainement de 250 millions de livres, soit plus de 6 milliards de francs. Enfin aux États-Unis, dans la ville de New-York, les banques au moment de la crise de 1857, au mois d’août, avaient en dépôt 94 millions de dollars, ce qui paraissait alors un chiffre énorme pour une seule ville ; elles ont aujourd’hui, d’après le bilan du 10 octobre 1863, plus de 180 millions. Voilà le capital qui sert à déterminer le taux de l’intérêt, ce n’est pas le billet au porteur, qui n’est qu’un capital imaginaire, qui d’ailleurs ne peut jamais avoir assez d’importance pour agir sur les rapports de l’offre et de la demande. Ce n’est pas non plus la richesse mobilière prise en général, car cette richesse, quelque grande qu’elle soit, n’est pas toute disponible, elle est employée pour la plus grande partie ; ce ne sont pas même les 5 ou 6 milliards de numéraire qui existent, dit-on, dans notre pays, car tant qu’ils restent dans la circulation, ils ne sont pas disponibles davantage, et il n’y a que le capital disponible qui puisse agir sur le taux de l’intérêt. Or ce capital disponible, c’est celui qu’on trouve sur le marché des capitaux, que ce marché s’appelle la bourse, le comptoir d’une maison de banque ou même une étude de notaire. Nous n’avons aucun moyen de nous rendre un compte exact de ce qu’il peut en y avoir en France dans les mains des notaires pour les placemens qu’ils ont à faire, ni même ce qui en arrive a la Bourse ; mais si nous interrogeons le chiffre des dépôts de toutes les banques publiques, et c’est là surtout le véritable capital disponible pour les usages commerciaux, nous trouvons qu’il atteint à peine 400 millions pour Paris, et comme Paris est plus que jamais le grand réservoir financier de notre pays, ce serait s’avancer beaucoup que de dire qu’il y en a autant dans le reste de la France. Supposons-le pourtant, et ajoutons-y encore de 6 à 700 millions pour les emplois de la Bourse et ceux des notaires, nous voilà à 1 milliard 500 millions, c’est-à-dire au chiffre du capital disponible