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dépit des affirmations de quelques touristes du dernier siècle, il nous fut impossible d’en retrouver ni dans la ville même ni dans ses environs. Les recherches auxquelles je me livrai à cet effet avec mon compagnon de route, M. Léon Thenon, un de mes collègues à l’école française d’Athènes, n’eurent aucun résultat. La ville moderne a évidemment employé dans ses constructions tout ce qui pouvait subsister de l’antique cité déjà mentionnée par Homère.

Il n’y a donc rien à La Canée qui mérite d’y retenir longtemps le voyageur, et nous pouvions avant la mauvaise saison nous hâter de nous enfoncer dans l’intérieur de l’île, de nous diriger vers la côte occidentale, vers les intéressans districts de Sélino et de Sfakia. Deux heures de chemin à l’ouest de La Canée conduisent, à travers des collines pelées et fort laides, jusqu’à Platania, un village qui doit son nom aux beaux platanes que borde sa rivière. Un peu plus loin, on rencontre le couvent de Gonia, situé, comme l’indique son nom, dans l’angle extrême du golfe de La Canée, à la naissance du cap Spada, l’ancien Mont-Dictymnéen. Du couvent jusqu’à la pointe de cette étroite langue de terre, il n’y a que des montagnes stériles et nues. Après avoir franchi la chaîne qui rattache le cap Spada au noyau central des Monts-Blancs, on se trouve, au commencement du second jour de marche, dans l’éparchie ou district de Kissamos. Elle a pour chef-lieu Kissamo-Kastéli, une bourgade d’une vingtaine de maisons, qui doit son importance administrative aux murailles de sa petite forteresse, jadis construite par les Vénitiens, comme l’attestent deux inscriptions latines qui se lisent au-dessus de la grande porte d’entrée ; la plus moderne est de 1653, d’un Contarini, qui a fait remettre la place en état de défense au moment où la menaçaient déjà les Turcs, qui s’en emparèrent bientôt après. Pendant la guerre de l’indépendance, tous les musulmans de l’éparchie, se sentant trop faibles pour tenir la campagne, s’étaient réfugiés dans le château de Kissamo et s’y défendirent longtemps. La peste les y décima, et après de longues et affreuses souffrances ils finirent par se rendre aux Grecs.

À peu de distance au sud de Kissamo-Kastéli, le village de Palæeo-Castro occupe une toute petite partie de l’enceinte que remplissait autrefois Polyrrhénie, une des villes les plus importantes de l’ancienne Crète. Cette ville était située sur une haute et raide colline, à une heure et demie de la mer. Vers le nord-est seulement, le sommet qui portait l’acropole se rattachait aux montagnes voisines ; de tous les autres côtés, ce sont des pentes rapides et des précipices, de profondes vallées qui remontent vers les Monts-Blancs. Une partie de l’enceinte subsiste encore, ainsi que de nombreuses chambres taillées dans le roc, et qui formaient sans doute la partie postérieure d’autant de maisons. On reconnaît aussi les débris du