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non pas la commune asservie aux règlemens et à des formes commandées, mais la commune prenant à cœur de gouverner ses écoles comme elle l’entend et à l’abri de toute pression gênante, la commune agissant par elle-même ou par un conseil de perfectionnement auquel elle délègue ses pouvoirs.

Le collège Chaptal et l’école Turgot, fondés et entretenus par la préfecture de la Seine, témoignent de ce que contient en germe : ce régime d’émancipation tempérée. Au début, il ne s’agissait que d’écoles primaires fortement constituées et dotées assez généreusement pour qu’elles devinssent des modèles. Le résultat a été non-seulement atteint, mais dépassé. Dans les mains de directeurs zélés et judicieux, les deux établissemens ont vu leur destination grandir et leur nom se répandre ; seulement il s’est fait entre eux comme un partage d’attributions qui tenait à la clientèle. Établie au cœur de quartiers populeux, l’institution Turgot est restée une école primaire d’un degré supérieur, avec des professeurs de choix et des matières d’enseignement poussées à la limite qu’utilement il était permis d’atteindre. Elle compte aujourd’hui sept cent quarante élèves, tous. externes et appartenant aux classes que la municipalité avait en vue de favoriser. La rétribution scolaire est des plus modiques, et pourtant, par suite d’une affluence soutenue, on est arrivé graduellement à une meilleure balance entre les dépenses et les recettes. La ville s’en tire avec quelques milliers de francs de sacrifices. Situé dans un quartier riche, le collège Chaptal a visé et dû viser plus haut ; il est devenu l’équivalent d’un lycée avec des internes et des externes, six cents des premiers, trois cent cinquante des seconds. Toutes les conditions y sont représentées. Sous ce rapport, il allait de soi qu’on élevât le niveau de l’enseignement, qu’on y comprît plus de matières, et que la durée des études fût prolongée : c’est ce qui a été fait. Le collège Chaptal, dans ses divisions intérieures, résume toutes les carrières. Il reste élémentaire pour les élèves qui ne peuvent pas aller au-delà, ouvre des classes de latin à ceux qui y ont quelque disposition, et des cours préparatoires pour ceux qui se destinent aux grandes écoles de l’état. Cette éducation est calculée de manière à être complète dans ses trois parties et à remplir son objet, même quand on l’abandonne en chemin ; elle est fortifiée à tous les degrés par des conférences littéraires qui servent de contre-poids aux notions techniques. Les aperçus généraux y sont placés, au seuil des sciences, comme introduction ; la philosophie, l’économie politique, figurent dans les programmes comme des hardiesses de bon goût. Dans tout ceci, le collège Chaptal a été justifié par le succès ; il donne. par an 100,000 francs de bénéfice. La ville, qui comptait sur une chargé, se trouve avoir fait une bonne affaire. Voilà le fruit d’une