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les mots empruntés aux idiomes persans, arabes ou indiens qui ont un alphabet différent du nôtre ; mais ces bizarreries de la nomenclature géographique n’ont plus de raison d’être au sein de l’Europe entre des populations dont les rapports sont fréquens. Sans encourir le reproche de chercher à outrance la couleur locale, on peut désirer que Londres, Vienne, Cologne, reprennent sur nos cartes le nom qui leur est propre, et dans le discours la prononciation que les indigènes leur donnent. Il résulte des habitudes orthographiques actuelles que les cartes exotiques sont quelquefois indéchiffrables pour des lecteurs français.

Il y a aussi un désaccord regrettable entre les travaux topographiques des divers états en ce qui concerne l’échelle des cartes. On admet que le terrain ne peut être représenté avec assez de détails, si l’échelle n’est plus grande que le 100, 000e. Au-dessous de cette limite, on n’a plus que des cartes d’ensemble, des cartes chorographiques, qui sont utiles sans contredit lorsqu’on veut étudier la surface entière d’une contrée ou l’aspect général d’une province, mais qui ne peuvent contenir toutes les indications propres à faire apprécier la nature et la configuration du sol. En France, on a d’une façon absolue adopté les échelles décimales[1]. La surface entière de la France comprend deux cent soixante-huit feuilles, à l’échelle du 80,000e dont sept sont consacrées aux départemens récemment annexés, chaque feuille représentant une surface de 40 kilomètres de haut sur 64 kilomètres de large. L’ensemble de cette carte, si l’on en réunissait toutes les parties bout à bout, couvrirait un espace de 11 mètres sur 13 ; mais les feuilles sont faites pour être consultées isolément, pour être examinées de près, et non pour être réunies les unes aux autres.

Le cadastre français, qui fut une entreprise locale poursuivie avec les fonds que votaient chaque année les conseils-généraux des départemens, n’a rien eu de commun avec les travaux géodésiques. Il en résulte peu d’inconvéniens, car il n’importe guère que le plan d’ensemble du cadastre soit imparfait, pourvu que l’arpentage des parcelles soit juste et que le plan de chaque commune ne contienne pas d’erreur sensible. En Angleterre, ces deux opérations, topographier et lever des plans cadastraux, ont été confondues. Après de longues discussions et plusieurs enquêtes parlementaires, il fut dé-

  1. Le cadastre est au 1,000e ; les plans spéciaux d’une ville, d’une place forte, se font au 2,000e ou au 2,500e ; pour la carte de l’état-major, les levers ont été faits dans l’origine au 10,000e, puis au 20,000e et enfin au 40,000e ; les feuilles gravées, réduites d’après les minutes, sont au 80,000e. On s’accorde à reconnaître que cette dimension est bien suffisante pour les usages habituels, pour les travaux publics et pour les opérations militaires.