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muscles très minces et très transparens des reptiles, ensuite dans les mammifères, et enfin dans l’homme. Les nerfs moteurs percent d’abord l’enveloppe de la fibre musculaire, puis se renflent en une sorte de disque qui s’étale sur la fibre elle-même. Ce disque rappelle celui qui termine les fils métalliques conducteurs de l’électricité qu’on applique sur la peau. Tout le mécanisme de la contraction musculaire se rattache donc étroitement aux phénomènes électriques que nous connaissons. Un certain nombre d’anatomistes allemands ont vérifié depuis l’exactitude des observations de M. Rouget ; mais, au lieu de rendre franchement à l’auteur de cette découverte la justice qui lui est due, plusieurs d’entre eux l’ont présentée sous une forme telle que le lecteur dépaysé ne saurait démêler si c’est à eux ou à un savant français qu’appartient l’honneur de cette conquête scientifique.

Nous exposâmes ensuite des recherches qui nous sont propres sur les racines aérifères de quelques espèces du genre jussiœa. Ces plantes, originaires de la Virginie et de l’Orient, sont aquatiques et rappellent les œnothères : elles ont des racines ordinaires qui s’enfoncent dans la vase ; mais d’autres deviennent spongieuses, se remplissent d’air, sont dressées verticalement dans l’eau et font flotter à la surface les branches auxquelles elles sont attachées, remplissant à leur égard le rôle de ces vessies placées sous les aisselles du nageur timide qui se méfie de ses forces. Dans d’autres plantes, telles que la châtaigne d’eau (trapa natans), le pontederia crassipes, l’aldrovanda vesiculosa, ce sont les pétioles des feuilles qui se remplissent d’air à une certaine époque et font flotter la plante. Dans les jussiœa, un autre organe accomplit la même fonction : la racine se transforme en vessie natatoire. Il serait naturel de penser que l’air contenu dans les lacunes de ces racines offre la même composition que l’air dissous dans l’eau ou l’air atmosphérique ; mais il n’en est rien. Un jeune chimiste, M. Albert Montessier, s’est assuré que cet air est toujours plus pauvre en oxygène que l’air atmosphérique ou celui qui se trouve dissous dans l’eau. Cette observation, nouvelle pour la science, a vivement intéressé les illustres chimistes Liebig et Woehler, à qui je l’ai communiquée.

M. le professeur Heer, de Zurich, dont les botanistes et les géologues admirent les beaux travaux sur les végétaux fossiles, entretint la section après nous des plantes arctiques qui se trouvent dans les Alpes de la Suisse : il en a compté quatre-vingts en Engadine seulement. Dans le nombre se trouvent un arbre, le sorbier des oiseleurs, et trois arbustes, le saule des Lapons, le saule pentandre et le groseillier des Alpes. Quelques espèces arctiques sont répandues dans toute la Suisse : je me contenterai de citer le carnillet moussier (silene acaulis). Il n’est aucun voyageur qui n’ait admiré près de