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hiérarchique dont toutes les parties sont solidement liées. Ainsi tous les emplois sont occupés par neuf catégories de gradués, chacune se dédoublant pour former deux classes. Les offices d’huissiers, de lettrés, d’écrivains, de fournisseurs du gouvernement, d’officiers militaires des contingens provinciaux, de chefs de canton, de maires, sont réservés aux gens du peuple, qui font partie des huitième et neuvième classes de gradués, quand par leurs services ils ont mérité quelque récompense. — Les ministres, les commandans militaires, les gouverneurs, les grands mandarins, sont pris dans les premier et deuxième degrés de gradués. Six ministres se partagent l’administration du royaume : ce sont les ministres de l’intérieur, des finances, des rites ou cultes, de l’armée, des peines et des travaux publics. Un tribunal suprême ou cour d’appel siège dans la capitale sous la présidence d’un haut personnage. Ce tribunal est un comice où sont convoqués les princes, ministres, grands mandarins civils et militaires, pour entendre les réclamations et les plaintes et y faire droit.

Le royaume d’Annam possède une armée régulière et permanente qui a son mode de recrutement, en outre une milice locale qu’on lève dans les provinces selon les besoins de l’état de guerre ou de paix, mais ordinairement pour les défendre des exactions des pirates ou des irruptions des gens des montagnes (moï). Son système financier se traduit en impôts de diverses sortes portant les uns sur les personnes, les autres sur les produits de la terre, en taxes sur quelques métiers et professions, et en contributions pour le service militaire. Cette organisation, on le voit, ne le cède en rien à celle de beaucoup d’états européens. La perception de ces impôts se fait en argent ou en nature : elle est confiée aux autorités locales, qui, par une combinaison ingénieuse, sont intéressées à lui faire produire le plus possible, parce que l’excédant de la quotité de recettes due au trésor royal reste à leur disposition et leur permet de pourvoir aux besoins de la localité.

La division territoriale de la province comprenait, avant l’occupation française, des centres de population de diverse importance, correspondant à nos départemens, à nos arrondissemens, à nos cantons et à nos communes. Chacune de ces circonscriptions avait à sa tête un fonctionnaire d’un grade proportionné à son étendue, et qui était chargé de l’administrer civilement et judiciairement[1]. Le système communal est resté fortement constitué. La commune est régie par trois fonctionnaires, dont deux, élus par les notables,

  1. Le phu ou préfet avait sous ses ordres un huyen ou sous-préfet; chaque phu administre deux arrondissemens, dont l’un par lui-même directement, l’autre par l’entremise de son sous-préfet.