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casernes, des hôpitaux, des magasins d’approvisionnemens, ont été établis à Saigon pour les troupes des différentes armes. Dès notre arrivée, un phare qui jette ses feux au loin sur la mer a été construit au cap Saint-Jacques pour diriger les bâtimens aux approches des côtes; un service de pilotage à l’embouchure du Donnaï conduit la navigation à travers les bancs de sable et les écueils ; la poste aux lettres est organisée d’après les erremens français; la télégraphie lui prête son concours et dessert déjà une étendue de plus de 400 kilomètres dans les provinces conquises ; un bassin de radoub avec tous les ateliers que comporte un pareil établissement sert à la réparation des navires de notre flotte mis à la disposition du gouverneur; un parc à charbons toujours largement approvisionné et muni d’appontemens pour faciliter l’embarquement du combustible pourvoit aux besoins de nos bateaux à vapeur. Enfin un corps d’ingénieurs hydrographes est sans cesse occupé à relever les sondages des fleuves et des rivières et à déterminer les plus sûrs mouillages dans les ports de notre possession.

Voulant montrer que la période militaire est à ses yeux décidément close, le gouverneur, M. de La Grandière, vient d’adresser au ministre de la marine le premier budget régulier de notre établissement. Ce budget repose sur les mêmes bases que ceux de nos autres colonies, c’est-à-dire qu’il n’embrasse que les dépenses de l’administration locale, celles du service militaire et de la division navale restant à la charge de la métropole. On constate avec satisfaction dans ce document que déjà les recettes équilibrent les dépenses : elles sont les unes et les autres d’un peu plus de 3 millions de francs. La progression des ressources est le symptôme le plus significatif des améliorations introduites dans l’intérieur du pays. C’est ainsi que la contribution personnelle, qui n’était que de 60,000 fr. en 1863, s’élèvera, pour l’exercice 1864, au chiffre de 438,000 fr., et l’impôt des villages, qui avait donné 130,000 francs en 1862 et 216,000 francs en 1863, est évalué à 700,000 francs pour l’année courante. Ces augmentations rapides sont le résultat du rétablissement de l’ordre. Ce début devrait nous faire envisager avec confiance l’avenir de notre nouvelle possession, surtout si l’on peut quelque jour, par un emploi prudent des milices locales, pratiquer le système qui a si parfaitement réussi aux Hollandais dans leurs possessions des Indes orientales. Il est dans l’intérieur de Java telle résidence dont la population indigène dépasse 500,000 âmes, et qui n’a pour la gouverner que deux Européens sûrs de voir leurs ordres exécutés avec une ponctuelle obéissance. Il peut en être de même en Basse-Cochinchine; le caractère des Annamites est pour le moins aussi docile que celui des Javanais. L’amiral La Grandière se dispose certainement à entrer dans cette voie, car dès à présent il affirme