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où, pour composer et décomposer les trains, la manœuvre exige un emprunt respectif des voies. Déjà, nous l’avons vu, tous ces mouvemens s’y opèrent à des vitesses réduites, ce qui rend les rencontres moins formidables. Quant aux moyens préventifs, ils sont toujours les mêmes : ils consistent dans l’habileté des agens qui président aux manœuvres, dans des signaux fermant la voie obstruée et couvrant le train qui l’occupe. En dehors du concours actif de l’aiguilleur et du cantonnier, il existe à 1 kilomètre en tête de la gare une machine appelée disque, que l’agent manœuvre sans quitter son poste à l’aide d’un levier et d’un fil de transmission. La voie est-elle encombrée, il renverse ce levier, une tringle portant le disque tourne sur son axe et présente la face rouge au train qui vient; celui-ci s’arrête à 500 mètres de distance, soit en tout à 1,500 mètres du point dangereux. C’est ce qu’on appelle fermer la voie. Cette mesure s’étend aux stations comme à tous les points de la ligne où l’utilité en est reconnue. Ce n’est pas tout : quand l’obstruction en un endroit est plus habituelle que le libre passage (c’est le cas des grandes gares), le disque demeure tourné au rouge; en d’autres termes, la gare reste habituellement fermée, et elle n’est ouverte qu’au moment de recevoir le train, quand toutes les dispositions ont été prises. C’est là encore un de ces signaux dits positifs dont le cantonnier en faction nous a déjà fourni l’exemple.

Il était à craindre que ce disque ne se trouvât effacé à l’insu du chef de gare; l’agent pouvait oublier de le tourner au rouge, ou un dérangement pouvait se produire dans le système. Presque tous les accidens arrivés en gare doivent être attribués à la confiance trompeuse que l’on fondait sur le jeu du disque. Récemment on a imaginé de munir le disque d’un répétiteur électrique, petit appareil que les voyageurs ont pu voir dans les stations, et dont le carillon ne cesse de retentir tant que la voie est fermée. Si par quelque incident le disque vient à s’effacer, c’est-à-dire s’il cache sa plate-forme rouge, la sonnerie s’arrête, et les agens, avertis, prennent leurs mesures.

L’abordage de front, nous l’avons vu, est très rare; mais on ne saurait malheureusement en dire autant des collisions par derrière entre les trains qui se poursuivent. On s’efforce de les éviter par l’habile combinaison du mouvement des trains. Comme il serait impossible, sans des calculs infinis, de déterminer leurs distances respectives, le chef de mouvement y supplée par un curieux tracé graphique : c’est une sorte de tableau synoptique de la marche des trains représentés par des lignes d’inclinaison correspondant à la vitesse; on suit sur ce tracé, minute par minute, kilomètre par kilomètre, tout l’ensemble du service. Les initiés seuls ont l’art de