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cette dernière politique un moyen puissant de faire pénétrer dans l’extrême Orient leurs idées, leurs mœurs, et d’y préparer les réformes propres à prévenir le retour périodique de ces crises que les vices du régime existant rendaient inévitables. D’un autre côté, elles en ont retiré personnellement des avantages qui leur permettent de considérer cette introduction de leurs nationaux dans les rangs de la hiérarchie de la Chine comme un des élémens les plus sûrs de leur influence. Dès l’année 1855, la collection des revenus de la douane de Shang-haï avait été confiée à des étrangers. À cette époque, des bandes de brigands, qui prétendaient faussement faire partie des Taï-pings, s’étant emparés de cette ville, les consuls résolurent de conserver au gouvernement une sorte d’action en lui sauvegardant les droits de douane qu’il prélevait sur le commerce étranger. Aucune autorité n’existant plus de fait dans la ville conquise, ils nommèrent trois commissaires, l’un anglais, l’autre français, le troisième américain, auxquels la perception de cet important revenu fut confiée. Quand la ville fut délivrée par la division navale française, les autorités de la province, qui avaient compris les résultats heureux du système fondé par les consuls, demandèrent qu’il fût continué. Les trois commissaires gardèrent donc leur position; mais, au lieu de rester collecteurs, ils se firent inspecteurs, c’est-à-dire que l’argent des douanes fut perçu sous leur contrôle. A la fin de 1858, le commissaire français et le commissaire américain donnèrent leur démission; le commissaire anglais, M. Lay, demeura seul chargé de l’inspectorat, et il s’occupa aussitôt de l’étendre à tous les ports ouverts au commerce étranger. Le gouvernement chinois approuva ses propositions, mais ne le reconnut officiellement qu’en octobre 1862, après le traité de Pékin. Il reçut alors une commission d’inspecteur-général des douanes, et des brevets furent donnés aux personnes dont il fit ses chefs de service. Pour éviter les récriminations qui n’auraient pas manqué de se produire, M. Lay a aussitôt appelé à lui des personnes de toutes les nations; la France est représentée dans les deux ports de Ning-po et de Fou-tchao. L’accroissement que les revenus ont pris sous l’inspectorat, qui ne porte exclusivement que sur les droits versés par le commerce étranger, a montré au trésor de l’état ce qu’il devrait attendre d’une collection honnête des impôts.

En même temps que ce concours des étrangers conservait au gouvernement de Pékin d’utiles ressources, des officiers assuraient son salut en lui créant des troupes sérieuses. Il sera sans doute intéressant pour le lecteur de connaître la part prise par la France à la direction de ces premiers corps de troupes chinoises régulières. Lorsque les amiraux alliés résolurent en 1862 d’attaquer les armées