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la première partie, je laisse de côté ces faits et ces débats de circonstance ; c’est de la religion chrétienne en elle-même, de ses croyances fondamentales et de leur légitimité que je m’occupe ; c’est la vérité du christianisme que je voudrais mettre en lumière en le mettant en présence des systèmes et des doutes qu’on lui oppose. Je m’abstiendrai de toute polémique directe et personnelle ; les personnes embarrassent et enveniment les questions : on ménage ou l’on injurie ses adversaires, deux genres de fausseté qui me sont également antipathiques. Je ne veux avoir pour adversaires que les idées, et quelles que soient les idées, j’admets la sincérité possible de ceux qui les professent : la discussion n’est sérieuse qu’à cette condition, et ni l’énormité intellectuelle de l’erreur, ni ses funestes conséquences pratiques, n’excluent sa sincérité. L’esprit de l’homme est encore plus facile à séduire et plus égoïste que son cœur ; quand il a conçu et exprimé une idée, il s’y attache comme à son œuvre propre et s’y emprisonne orgueilleusement, comme s’il était en possession de la pure et pleine vérité.

Ces Méditations seront divisées en quatre séries. Dans la première, j’expose et j’établis ce qui est, selon moi, l’essence de la religion chrétienne, c’est-à-dire les problèmes naturels auxquels elle répond, les dogmes fondamentaux par lesquels elle résout ces problèmes, et les faits surnaturels sur lesquels ces dogmes reposent, la création, la révélation, l’inspiration des livres saints, Dieu selon la Bible, Jésus-Christ selon l’Évangile. Après l’essence de la religion chrétienne vient son histoire ; elle sera l’objet d’une seconde série de Méditations dans lesquelles j’examinerai l’authenticité des livres saints, les causes premières de la fondation du christianisme, ce qu’ont toujours été la foi chrétienne et l’église chrétienne à travers les siècles et malgré leurs vicissitudes, la grande crise religieuse qui, au XVIe siècle, a divisé l’église chrétienne et partagé l’Europe entre le catholicisme et le protestantisme, enfin les crises anti-chrétiennes qui, à diverses époques et en divers pays, ont mis en question et en péril le christianisme lui-même, et qu’il a toujours surmontées. La troisième série de ces Méditations sera consacrée à l’étude de l’état actuel de la religion chrétienne, de son état intérieur et extérieur ; je retracerai le réveil chrétien qui s’est manifesté parmi nous dès l’ouverture du XIXe siècle, soit dans l’église catholique, soit dans l’église protestante, l’élan de la philosophie spiritualiste, qui s’est relevée à cette même époque, et le mouvement anti-chrétien qui a éclaté bientôt après dans la renaissance du matérialisme, du. panthéisme, du scepticisme, et dans les travaux de la critique historique. J’essaierai de déterminer l’idée et par conséquent, selon moi, l’erreur fondamentale de ces divers systèmes,