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LE PORTUGAL
SOUS LE ROI DON LUIZ
IMPRESSIONS ET SOUVENIRS.


I.

Depuis quelques années, l’Europe s’est peu occupée du Portugal, et il n’est guère de pays dont l’histoire intérieure, à part quelques courtes périodes, soit moins connue. Pour secouer notre indifférence, il a fallu des commotions politiques qui, à deux ou trois reprises, jetèrent parmi nous une émigration jeune et intelligente, l’élite de la nation portugaise. À l’abri de nos lois vint se réfugier une génération qui, sous le gouvernement de dom Miguel, avait abandonné tout à coup les bancs de la célèbre université de Coïmbre pour fuir les gibets que l’on dressait aux cris de vive la religion ! vive le roi absolu ! Ces jeunes soldats du bataillon académique nous révélèrent les premiers ce qu’il y avait de vitalité politique dans le Portugal. Plus tard, après avoir partagé les périls du chevaleresque Pedro IV, qui, accouru du Brésil, venait sauver le trône de sa fille en le plaçant sous la protection du drapeau de la liberté, ces jeunes gens, devenus hommes, surent de nouveau appeler l’attention sur un pays dont le nom avait rempli le monde.

La situation géographique du Portugal a toujours été pour beaucoup dans notre indifférence à l’égard de ce petit royaume, placé à l’extrême occident de l’Europe. Il fallait, pour y arriver, braver les hasards de la mer ou les fatigues d’un long voyage en diligence, à travers l’Espagne, des Pyrénées à Badajoz ; hasards et fatigues disparaissent aujourd’hui. De Nantes et de Bordeaux partent régulièrement des bateaux à vapeur qui vous déposent à jour fixe sur les quais de Lisbonne ou de Porto. Le chemin de fer, d’un autre côté,