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de quartz pur et limpide, et eût dès lors crié aux merveilles. Ces hommes simples, à demi sauvages, ne connaissaient pour la plupart les pierres précieuses que de nom. Tout caillou transparent ou reflétant de belles nuances était pour eux un objet de prix. Ils partirent donc à l’aventure, persuadés que, s’ils n’avaient pas la bonne fortune de découvrir la montagne des brillans, ils pourraient rencontrer sur leur route quelque ruisseau aurifère ou tout au moins quelque tribu indienne qui, bientôt réduite à l’esclavage grâce à leurs armes à feu, les dédommagerait ainsi de leurs fatigues et de leurs déceptions. On se rappelle que c’est en donnant la chasse aux peaux-rouges que les mamelucos avaient pris le goût de ces courses à travers le désert. Cependant les résultats se firent longtemps attendre. Le diamant n’a pas naturellement cet éclat qu’il projette lorsque, après avoir été taillé, il est pénétré en tous sens par les lumières d’un salon, et nos coureurs des bois ne pouvaient songer à voir un brillant dans ces petits cailloux à surface terne qu’ils rencontraient quelquefois dans le lit des ruisseaux au milieu d’un ciment ferrugineux, tandis que l’or se montrait à eux immédiatement en belles pépites et dans son éclat naturel. Aussi bien des années s’écoulèrent en recherches infructueuses. Cependant quelques-unes de ces pierres offraient parfois des reflets si extraordinaires, malgré leur surface terne et dépolie, que certains amateurs les recueillaient à tout hasard, et s’en servaient au jeu comme de jetons. La tradition veut que, vers 1729, un certain Bernardo Fonseca Lobo ait le premier soupçonné la véritable nature des pierres qu’il avait découvertes dans le Serro-do-Frio (montagne du froid), contrée montueuse enclavée dans la partie la plus escarpée de la province de Minas-Geraes, et qui devait bientôt devenir si célèbre sous le nom de district des diamans. D’autres trouvailles semblables, s’étant répétées sur différens points, donnèrent l’éveil au gouverneur de la province. Voulant savoir à quoi s’en tenir, il résolut d’envoyer à Lisbonne quelques échantillons de ces « cailloux transparens, » comme on les appelait alors. Les gens de la cour, qui ne connaissaient guère encore que les diamans taillés, n’osèrent pas se prononcer, et s’adressèrent à l’ambassadeur de Hollande, qui de son côté renvoya les échantillons aux bijoutiers d’Amsterdam. On sait que déjà, à cette époque, les ouvriers néerlandais étaient les plus renommés en Europe pour la taille des pierres. Ceux-ci répondirent que les cailloux trouvés dans les ruisseaux du Brésil étaient de véritables diamans, et qu’ils avaient autant de valeur que ceux de l’Inde. Cette nouvelle, répandue comme la foudre, réveilla parmi les populations des deux péninsules la fièvre qu’avaient provoquée les premiers cris de l’eldorado. Tandis que les anciens explorateurs se lamentaient d’avoir rejeté si longtemps, comme sans valeur, ces