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l’assemblée, La réception faite au roi dans les Iles-Ioniennes n’était ni moins brillante ni moins enthousiaste que celle qu’il avait trouvée dans les provinces continentales. On s’occupait aussi avec activité des prochaines élections, et dans la plupart des îles on avait le bon sens de moins tenir compte des anciennes divisions locales que du mérite des candidats et de leur esprit sagement conservateur. Partout, il est vrai, on n’avait pas la même prudence, mais les résultats définitifs du scrutin assuraient la formation d’un groupe compacte de 50 à 60 voix, qui ne sera certainement pas sans importance dans l’assemblée d’Athènes.


III

Le premier objet des travaux communs de la royauté grecque et de l’assemblée nationale, complétée par l’adjonction des députés ioniens, doit être la question constitutionnelle. Après l’ébranlement causé par la révolution du 22 octobre, une révision du pacte fondamental est nécessaire. Le projet de constitution nouvelle est déjà publié ; il reproduit en grande partie la constitution de 1843, calquée, comme celle de la Belgique, sur la constitution française de 1830, mais en y ajoutant un certain nombre d’innovations et de changemens, dont quelques-uns sont fort heureux. Des pays beaucoup plus civilisés que la Grèce y trouveraient même à envier certaines dispositions, entre autres l’article qui donne à tout citoyen lésé par l’acte d’un fonctionnaire public le droit de l’attaquer devant les tribunaux ordinaires. La discussion de ce projet, par l’issue qu’elle aura, est destinée à exercer une influence décisive sur l’avenir de l’état hellénique. Il se présente en effet sur le terrain de la constitution nouvelle une question fondamentale, la première grande question de principe jusqu’à présent soulevée en Grèce, et qui offre une frappante ressemblance avec celle qui formait le fond du débat dans notre première constituante en 1790 et 1791. Deux partis sont en présence dans l’assemblée d’Athènes : l’un, conservateur, monarchique et sincèrement libéral, qui veut fonder un gouvernement parlementaire sérieux, ou la royauté exerce dans toute sa plénitude le rôle qui lui appartient légitimement ; l’autre, démagogique et guidé, sans peut-être s’en rendre lui-même complètement compte, par des tendances républicaines, qui poursuit l’annulation de l’autorité souveraine en restreignant sa prérogative par tous les moyens. C’est l’influence de ce dernier parti qui a fait introduire dans le projet de charte un article par lequel on prétend imposer au roi l’obligation absolue de prendre ses ministres dans les chambres. La restriction excessive de la prérogative royale serait