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palmiers ; les rivières, qui devenaient permanentes et plus larges, contenaient d’excellens poissons, précieuse ressource pour des hommes réduits depuis leur départ à ne consommer que des viandes salées. Stuart savait par ses observations astronomiques qu’il devait être très près de la côte ; les arbres étaient plus petits et rabougris, comme il arrive partout à proximité de l’océan. Enfin il entendit dans le lointain le grondement bien connu des vagues. Quelques pas encore et l’Océan-Indien s’offrit aux voyageurs ravis, but suprême de tant d’efforts et de fatigues. Le point où ils avaient touché la côte est voisin du cap Hotham, dans le golfe de Van-Diémen et à une faible distance à l’est de l’embouchure de la Rivière-Adélaïde. On arbora au haut d’un arbre le drapeau britannique au milieu duquel était brodé le nom du chef de l’expédition ; une boîte en fer-blanc fut enfouie au pied avec une courte relation du voyage, et la troupe se remit en route pour revenir vers le sud. Le retour ne fut pas heureux. Les noirs devinrent menaçans et entourèrent les voyageurs en poussant leur cri de guerre ; il fallut quelques coups de feu pour les tenir à distance ; puis Stuart fut pris du scorbut, et devint malade au point de ne pouvoir plus se tenir à cheval. Néanmoins l’expédition put rentrer sans pertes à Adélaïde après une absence de neuf mois. La population européenne fit un accueil magnifique et bien mérité à l’aventureux bushman, qui venait de lui ouvrir de si vastes domaines. Vingt mille colons allèrent, dit-on, au-devant de lui, avec le gouverneur de l’Australie-Méridionale à leur tête, et la législature de cette province lui décerna généreusement le prix de 50,000 francs qu’elle avait fondé en 1859 pour récompenser le premier qui traverserait le continent.

Les résultats les plus intéressans de ce troisième voyage sont dus à un naturaliste, M. Waterhouse, qui faisait partie de la mission, et qui a rapporté de nombreuses observations sur les contrées traversées. Par malheur, ce savant n’avait à sa disposition ni thermomètre ni baromètre, en sorte qu’il ne reste que des renseignemens très vagues sur le climat et l’altitude du pays. Les instrumens de précision sont difficiles à conserver lorsqu’on n’a d’autres moyens de transport que les bêtes de somme. Une partie des collections de botanique et de minéralogie fut perdue pour la même raison. M. Waterhouse divise le pays, au long du diamètre australien qu’il a parcouru, du Golfe-Spencer au golfe de Van-Diémen, en trois régions distinctes bien caractérisées. La première, en venant du sud, s’étend jusqu’aux environs du 27e degré de latitude ; elle est remarquable par la nature saline du sol et par de nombreuses sources qui jaillissent au milieu des plaines, et dont l’orifice est en général au sommet d’un petit mamelon conique :