Page:Revue des Deux Mondes - 1864 - tome 52.djvu/777

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

être que profitable à l’autorité du gouvernement. Une règle essentielle du régime représentatif serait ainsi confirmée comme sortant de la nature des choses, et recevrait la sanction de l’expérience pratique.

Après les grandes discussions auxquelles le conflit dano-allemand a donné lieu dans le parlement anglais, après les conjectures et les déclamations qu’ont provoquées les fameuses dépêches qui, sous une forme falsifiée, nous révélaient le fait vrai de l’alliance du Nord, la politique étrangère se trouve ramenée au courant des faits quotidiens. La conférence de Vienne, où les Danois, les Autrichiens et les Prussiens discutent les conditions de la paix, est loin d’exciter l’intérêt de curiosité qu’a si longtemps entretenu la conférence de Londres. En dépit de ses lenteurs, la négociation devienne, se réduisant à régler la capitulation du Danemark, doit aboutir infailliblement à la paix. Ce qui est piquant, c’est que la diète, qui avait pu prendre à la conférence de Londres, en la personne de M. de Beust, les plus nobles et les plus imposantes attitudes, ne brille à Vienne que par son absence. Dès que l’affaire n’a plus eu à se traiter qu’entre le Danemark et l’Allemagne, la Prusse et l’Autriche l’ont prise exclusivement en main, et la diète a été congédiée. Les états secondaires ne trouvent point chez leurs grands confédérés la courtoisie que leur ont si libéralement témoignée la France et l’Angleterre. C’est l’éternelle histoire des affaires allemandes, illustrée encore par l’épisode de Rendsbourg et la façon cavalière dont la Prusse s’est emparée de cette place en mettant à la porte les troupes de la diète. Les grands ministres des petits états sont trop accoutumés à ces procédés pour avoir le droit de paraître surpris de leur présente mésaventure. On a fait avec exactitude de la façon suivante l’historique du mouvement allemand dans l’affaire du Slesvig-Holstein. Le parti populaire et radical a pris feu le premier ; de peur d’être débordées, les cours secondaires ont cédé à l’impulsion populaire et ont voulu prendre la direction du mouvement national ; les deux grandes puissances, la Prusse et l’Autriche, ne voulant point laisser acquérir tant d’importance aux petits états, ont pris sur eux l’avance et ont fait la guerre. Il n’y a qu’à retourner cette progression pour deviner, l’histoire qui va suivre. L’affaire faite, le succès acquis grâce à l’abstention de l’Angleterre et de la France, la Prusse et l’Autriche mettent de côté les petites cours ; les petites cours mettront de côté le parti populaire. En définitive, cette équipée, commencée étourdiment par les radicaux, ne tournera qu’au profit de la réaction en attendant d’autres aventures.

Il y a quelque temps que l’on peut reconnaître à certains symptômes le commencement d’une sorte de reflux réactionnaire. Ces symptômes se manifestent même par le léger malaise que ressentent passagèrement des états qui paraissaient placés dans les conditions les plus heureuses. Ce n’est point sans inquiétude et sans regret par exemple que nous avons vu cette année en Belgique le gouvernement enrayé aux mains d’un ministère libéral