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ont été ceux de notre hiver. Les vents subissent plus de variations-que la pluie ; cependant ils ont une tendance à souffler de l’est avec une légère déviation, tantôt vers le nord, tantôt vers le sud, en suivant les mouvemens du soleil. L’élévation du plateau, le réseau de montagnes qui le met à l’abri des vents brûlans des terres basses ou de la-côte, les vastes bassins qu’il renferme y entretiennent une température fort supportable. Les oscillations du thermomètre centigrade se sont maintenues entre les 15e et 30e degrés. Le capitaine a toujours pu porter ses vêtemens de laine, et s’est constamment servi de ses couvertures la nuit.

La végétation, sous la zone qui embrasse 5 degrés de chaque côté de la ligne, est d’une extrême richesse. Il y a en effet peu de pays aussi favorisés que celui-là. Il est abondamment arrosé, et la chaleur, sans être trop forte ; l’est assez pour donner à la terre une grande puissance de production. Il n’en est pas de même des contrées qui s’éloignent de cette zone au nord et au sud : elles perdent de leur fertilité dans les proportions de leur distance. Elles sont d’ailleurs soumises à des influences de climat bien différentes. L’année y est divisée en deux saisons, celle des pluies et celle d’une sécheresse souvent excessive, pendant laquelle l’indigène souffre parfois de la faim, car il n’entre pas dans sa nature indolente de penser à l’avenir. Le nègre, avec ses cheveux laineux et frisés, son nez épaté, ses grosses lèvres, sa bouche en saillie, son front déprimé, est le même dans ses traits généraux sous toutes les latitudes du continent africain[1]. Les nègres fuient les grandes agglomérations ; on ne rencontre aucune ville considérable dans l’Afrique orientale. La vie de village est pour eux la vie normale par excellence. Leur gouvernement est patriarcal. Ils ne reconnaissent que deux classes de supérieurs, les chefs de village et ceux de district, dont le pouvoir est absolu. Ces derniers sont assistés d’un conseil de vieillards qui remplissent en même temps les fonctions d’aides de camp pour transmettre leurs ordres aux autorités locales. Leurs décisions rencontrent peu d’opposition, car toute désobéissance est punie d’une amende. Les revenus de ce gouvernement primitif se composent d’un impôt en nature sur une boisson fermentée qu’on appelle pombé, d’une part dans les chasses d’éléphans, de lions, de rhinocéros et de léopards, et d’un droit perçu sur les marchands qui traversent le district. Ce droit s’appelle le hongo ; c’est la volonté seule du chef qui en détermine la valeur : il le calcule sur l’importance qu’il se donne ou sur l’étendue de son district. À ces revenus, il faut ajouter les confiscations des biens des individus condamnés à

  1. Les Wahuma seuls, représentans d’une race supérieure dont nous parlerons plus loin, font exception à ces caractères spécifiques.