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est qu’il commençait par les exercices de mémoire et par les données mathématiques. N’est-il pas bien probable que Pythagore prit aux prêtres, dans la familiarité desquels il fut si longtemps admis à vivre, cette habitude de découper la science en propositions hiérarchiquement disposées en quelque sorte ? Euclide emprunta sans doute un grand nombre de ses propositions aux élémens de l’école pythagoricienne, qui elle-même les emprunta à l’Égypte. La science africaine était déjà très avancée en tout ce qui concerne les propriétés des parallèles, l’étude du triangle, des polygones, de la sphère et du cercle, l’étude des figures semblables, c’est-à-dire composées par des lignes proportionnelles semblablement disposées. Sans doute, ni Thalès ni Pythagore ne se contentèrent de porter en Grèce l’énoncé et la démonstration des propositions égyptiennes ; leur génie ajouta quelque chose à l’œuvre étrangère. Néanmoins, parmi tant de propositions, la plupart anonymes et d’origine inconnue, n’est-il pas permis de supposer que beaucoup aient pris naissance dans les paisibles écoles de la vallée du Nil ? On connaît les principales propositions découvertes par Thalès lui-même ; Proclus nous en a transmis l’énoncé ; de Pythagore, il ne cite que deux propositions originales, dont l’une, il est vrai, d’une importance capitale, est bien connue sous le nom du carré de l’hypothénuse. Proclus a également fait connaître les théorèmes principaux dus aux disciples immédiats de Pythagore, mais il est possible que beaucoup d’entre eux aient d’abord été démontrés par le maître. Le Timée de Platon fournit la preuve que l’école pythagoricienne connaissait les cinq corps réguliers qui jouent un rôle si grand dans la cristallographie moderne, et dont l’étude suppose une géométrie déjà très fine et très élevée, le cube, le tétraèdre, l’octaèdre, l’icosaèdre, le dodécaèdre pentagonal. Il est impossible que l’étude de la sphère, et une étude très approfondie, n’ait point précédé celle de ces corps réguliers qui tous peuvent être inscrits dans une sphère. Quand on joint deux à deux les sommets opposés d’un pentagone, c’est-à-dire d’un polygone régulier de cinq côtés, on obtient une figure en forme d’étoile à cinq branches, qui paraît avoir joué un rôle mystique dans l’école pythagoricienne, et qui servait aux disciples de signe particulier de reconnaissance.

La critique admet aujourd’hui que l’Égypte a été avant la Grèce le berceau de la géométrie. Pythagore familiarisa ses élèves avec cette science et avec le mode d’enseignement qui a rendu un grand nombre de ses découvertes familières à tous les esprits en les gravant d’abord dans toutes les mémoires. Nous comprenons à peine aujourd’hui l’importance de cette science presque enfantine, dont les vérités ont pris de bonne heure pour nous le cachet de l’évidence,